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Cours de français en ligne (par B. MIRGAIN)

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Bernard.Mirgain@ac-nancy-metz.fr

Mise en ligne de cours de français. Aide gratuite pour les élèves.

http://www.lycee-pmf-epinal.fr

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DOM JUAN. ACTE V. SCENES 5, 6 et 7. AXES DE LECTURE.

Texte 4 : Acte V    Scène 5                

Dom Juan, un spectre en femme voilée, Sganarelle.
 
Le Spectre, en femme voilée
Dom Juan n'a plus qu'un moment à pouvoir profiter de la miséricorde du Ciel ; et s'il ne se repent ici, sa perte est résolue.
Sganarelle
Entendez-vous, Monsieur ?
Dom Juan
Qui ose tenir ces paroles ? Je crois connaître cette voix.
Sganarelle
Ah ! Monsieur, c'est un spectre : je le reconnais au marcher.
Dom Juan
Spectre, fantôme, ou diable, je veux voir ce que c'est.
Le Spectre change de figure, et représente le temps avec sa faux à la main.
Sganarelle
Ô Ciel ! voyez-vous, Monsieur, ce changement de figure ?
Dom Juan
Non, non, rien n'est capable de m'imprimer de la terreur, et je veux éprouver avec mon épée si c'est un corps ou un esprit.
Le Spectre s'envole dans le temps que Dom Juan le veut frapper.
Sganarelle
Ah ! Monsieur, rendez-vous à tant de preuves, et jetez-vous vite dans le repentir.
Dom Juan
Non, non, il ne sera pas dit, quoi qu'il arrive, que je sois capable de me repentir. Allons, suis-moi.

          Scène 6   La statue du commandeur, Dom Juan, Sganarelle.

La Statue
Arrêtez, Dom Juan : vous m'avez hier donné parole de venir manger avec moi.
Dom Juan
Oui. Où faut-il aller ?
La Statue
Donnez-moi la main.
Dom Juan
La voilà.
La Statue
Dom Juan, l'endurcissement au péché traîne une mort funeste, et les grâces du Ciel que l'on renvoie ouvrent un chemin à sa foudre.
Dom Juan
Ô Ciel ! que sens-je ? Un feu invisible me brûle, je n'en puis plus, et tout mon corps devient un brasier ardent. Ah !
Le tonnerre tombe avec un grand bruit et de grands éclairs sur Dom Juan ; la terre s'ouvre et l'abîme ; et il sort de grands feux de l'endroit où il est tombé.
                                                                                                                 Scène 7   Sganarelle

Sganarelle

Ah ! mes gages ! mes gages ! Voilà par sa mort un chacun satisfait : Ciel offensé, lois violées, filles séduites, familles déshonorées, parents outragés, femmes mises à mal, maris poussés à bout, tout le monde est content. Il n'y a que moi seul de malheureux. Mes gages ! Mes gages ! Mes gages !
 
Pour bien comprendre la fin de la pièce, il faut se reporter au fil de l'intrigue, notamment à l'acte III :

Dom Juan et Sganarelle s'égarent dans un bois et demandent leur chemin à un mendiant qui les met en garde contre les brigands.   Dom Juan vient en aide à un homme qui est molesté par ceux-ci. La victime n'est autre que Dom Carlos, le propre frère d'Elvire, accompagné de  son frère, Dom Alose, et d'une escorte. Ils voulaient venger leur s½ur, mais Dom Alose reconnaît Dom Juan, qu'il voulait tuer. Dom Carlos estime avoir une dette envers Dom Juan et persuade Dom Alose de remettre leur vengeance à plus tard. Dom Juan et Sganarelle reprennent la route quand Dom Juan aperçoit un monument dans cette même forêt. Sganarelle lui apprend que c'est le mausolée du Commandeur. Dom Juan souhaite visiter les lieux.
La seconde partie de la scène V de l'acte III se déroule à l'intérieur de ce sanctuaire qui abrite la statue du Commandeur.

Le tombeau s'ouvre, où l'on voit un superbe mausolée, et la statue du Commandeur.

.......« Mais quel est le superbe édifice que je vois entre ces arbres ? - Vous ne le savez pas ? - Non, vraiment. – Bon ! c'est le tombeau que le Commandeur faisait faire lorsque vous le tuâtes.

 – Ah ! tu as raison. Je ne savais pas que c'était de ce côté-ci qu'il était. Tout le monde m'a dit des merveilles de cet ouvrage, aussi bien que de la statue du Commandeur, et j'ai envie de l'aller voir »

.......« Ah! que cela est beau! Les belles statues! le beau marbre! les beaux piliers! Ah! que cela est beau! Qu'en dites-vous, Monsieur ? - Qu'on ne peut voir aller plus loin l'ambition d'un homme mort; et ce que je trouve admirable, c'est qu'un homme qui s'est passé, durant sa vie, d'une assez simple demeure, en veuille avoir une si magnifique pour quand il n'en a plus que faire ».

On situe le passage et on cerne l'enjeu avant d'annoncer les axes de son explication orale :

Le personnage éponyme de la pièce est invité à un mystérieux rendez-vous avec « la statue » : « Arrêtez, dom Juan. Vous m'avez hier donné parole de venir manger avec moi ».  Un rendez-vous qu'il accepte d'ailleurs avec un air détaché : « Oui. Où faut-il aller ? ». Le spectateur ne s'étonne pas de voir Dom Juan affronter, avec une vaillance digne de son caractère, la statue du Commandeur. On peut reprocher bien des turpitudes à ce libertin - bien qu'il ne s'agisse, après tout, que de quelques gaudrioles, ses friponneries ne prêtent pas à conséquence -  mais pas son manque de courage. Molière décide de rendre compte  des derniers moments d'un Dom Juan solitaire, revêche. Ce pugiliste flamboyant, ayant vendu son âme au diable comme le jugent ses nombreux accusateurs, ne rechigne pas. C'est un « esprit fort », un libre penseur. On l'accuse donc d'activités subversives. Il en faudrait davantage pour décourager ce libertin qui n'en finit pas de ne plus s'en laisser conter. Qui ne cherche à aucun moment de se disculper.

1er axe : une fin crépusculaire, tellurique, qui donne un ton tragique au scénario...

Dom Juan ne cherche en rien à narguer le « Seigneur Commandeur ». Rien ne l'indique dans leur échange (La Statue Arrêtez, Dom Juan : vous m'avez hier donné parole de venir manger avec moi. Dom Juan Oui. Où faut-il aller ? La Statue Donnez-moi la main. Dom Juan La voilà »). Molière met en scène la rencontre avec la Statue. Il ne prend même pas soin de rappeler qu'elle est enveloppée sous les soieries d'un costume d'empereur (« son habit d'empereur romain » évoqué dans la scène V de l'acte III). On peut imaginer une table dressée pour cette collation dans le mausolée de marbre froid que Sganarelle décrit dans la scène VI de l'acte III (le « tombeau du commandeur »). Au point de départ, rappelons-nous, c'est Dom Juan qui sollicite l'entrevue (« Il aurait tort, et ce serait mal recevoir l'honneur que je lui fais. Demande-lui s'il veut venir souper avec moi » - ibid).

Plongé dans l'obscurité d'une nuit ensanglantée, les personnages si pleins de chair et de sang cèdent la place à des feux follets, à des apparitions fantomatiques, surnaturelles.  Les dernières scènes de l'acte V nous éloignent de la vraisemblance. Elles nous immergent dans un espace imaginaire intemporel. Le caractère irréel du lieu, du décor le confirme. Cette ambiance toute shakespearienne (on pense à la danse des sorcières au début de la tragédie « Macbeth », publiée en 1623, mais aussi à « Hamlet » édité en 1603)  est propice aux spectres, aux revenants qui prédisent aux protagonistes les circonstances de leur mort prochaine. Ou bien qui réclament la réparation d'un préjudice, qui exigent qu'on remédie à une situation. A la fin de l'acte V, tout bascule dans la scène de l'étrange. Celle du repas funéraire au cours duquel les morts ou les spectres incorporels flottent au-dessus des convives.

La présence inquiétante d'une  statue ombrageuse  à la voix de rocaille tend à incarner l'inflexibilité du châtiment divin. Une image saisissante qui a de quoi faire frémir le public. Sauf que seul le poltron Sganarelle montre de l'effroi. Pas Dom Juan : « Non, non, rien n'est capable de m'imprimer de la terreur, et je veux éprouver avec mon épée si c'est un corps ou un esprit ».

Les exclamations apeurées de Sganarelle (« Ah ! Ô Ciel ») témoignent de sa hantise : « Ah ! Monsieur, c'est un spectre : je le reconnais au marcher [...] Ô Ciel ! voyez-vous, Monsieur, ce changement de figure ? ». Le décor changeant, suggéré par les didascalies, est suffisamment oppressant pour que le domestique ressente très fortement une menace. Les apparitions fantomatiques se métamorphosent. Apparaît d'abord un spectre, « en femme voilée ». Puis ce spectre  « change de figure, et représente le temps avec sa faux à la main » (1). La dernière mention didascalique de la scène V de l'acte V indique : « Le Spectre s'envole dans le temps que Dom Juan le veut frapper ». Molière ne cherche absolument pas à nous faire croire au réalisme de cette mise en scène, bien au contraire. Il accumule les poncifs et les clichés. Nous sommes en pleine irréalité. La mortelle frayeur de Sganarelle n'a rien de surprenant. Elle est sans surprise, tout au long de la pièce. Le but de Molière est d'inciter le public, non pas à partager cette peur, mais à rire des superstitions de ce domestique pitoyable. Faudrait-il léguer le monde à ce valet ridicule ? Il paraît difficile d'imaginer que Molière s'efforce d'arracher au public une allégeance enthousiaste qu'il prêterait sans ciller à ce pantin ridicule.
 
     Molière hérite dans sa pièce de scénarios déjà écrits, et notamment du canevas de Tirso de Molina (« L'abuseur de Séville et le convive de pierre » - pièce élaborée vers 1625). Son ½uvre renvoie à d'autres origines que sa propre imagination. Il a écrit le scénario au plus près des versions italiennes comme celle de Cicognini (« Il convitato di pietra ») et de tragicomédies françaises (« Le Festin de pierre ou le Fils criminel » de Claude Deschamps de Villiers - 1661). Il s'agit de réécritures explicites, de plagiats. Le dénouement de « Dom Juan » est serti dans un montage à l'à peu près qui reprend des thèmes similaires, les noms des personnages comportant des consonances espagnoles, voire même des formulations, des répliques... En sautant un peu du coq à l'âne tout de même dans son adaptation.

     Dom Juan risque de perdre la vie. Menacé par la mort toute proche, il devrait en toute logique renoncer à son sacerdoce athée. Mais il ne le fait pas dans la version de Molière ! Dom Juan se retrouve au milieu d'un tourbillon dans lequel il est aspiré. Sans jamais cesser de  défier les forces triomphantes, il  tient tête, sans agressivité. Malgré les menaces lourdement appuyées des uns et des autres,  le héros s'obstine dans son refus de complaire ou de rendre des comptes à qui que ce soit. Ce qui revient à considérer que Molière fait l'éloge d'une existence qui se complait dans la jouissance.

La mise en scène de Mesguish s'attache dès qu'on la regarde à un spectacle palpitant. Le lupanar lui sert de mausolée. L'image ténébreuse de la faucheuse se double d'une forme d'érotisme inversé. Des odalisques à la beauté troublante se vautrent sur un lit nuptial avec des poses lascives. Elles se jettent sur le corps du héros comme une nuée de vautours. Dévêtues, dansant pieds nus sur la dépouille de Don Juan, elles accaparent l'attention en jouant les contorsionnistes. Ce déshabillé n'a rien à voir avec la mode de l'époque, celle des robes à panier ou des vertugadins. Le metteur en scène Daniel Mesguisch chercherait-il à promouvoir l'émancipation d'une féminité libre ? Cette danse du ventre traduit-elle la volonté de ces courtisanes, de ces elfes dénudées de réduire le héros à l'impuissance ? Dans la version de Mesguisch, qui mêle les digressions érotiques aux frayeurs métaphysiques, la mort du personnage coïncide avec une explosion du plaisir orgasmique.

2° axe : cette tragédie est une critique sociale, une satire antireligieuse

         La fin de la pièce est  dépourvue de toute drôlerie. Pourquoi ? En fait, tout  se passe comme s'il se nouait entre le récepteur du texte (les spectateurs) et l'auteur une sorte de pacte très particulier. Dom Juan est un mari volage qui séduit des fillettes pauvres courant la campagne en sabots, comme Charlotte ou Mathurine. Présenté au mieux comme un inconstant avide de frivolités, au pire comme un cuistre ou un coquin, Dom Juan n'a rien à envier aux écarts de conduite de Louis XIV. Le roi de France est père de trois enfants issus de son mariage avec Marie-Thérèse (le dauphin Louis en 1661, Anne-Elisabeth en 1662, Marie-Anne en 1664). Le roi, lui aussi, ne surmonte pas la tentation.  Depuis 1662, il entretient une relation adultère avec Louise de La Vallière (1644-1710), alors âgée de dix-sept ans. Sa maîtresse et favorite déclarée lui a déjà donné deux garçons, Charles (né en décembre 1663, qui sera pris en charge par Colbert) et Philippe (né le 7 janvier 1665, peu avant la représentation de la pièce de Molière), qui tous deux furent baptisés sous une fausse identité.  Si l'on se replace dans le contexte de la cour du monarque, toute bruissante de galanteries embrouillées, le personnage de Dom Juan ne dépareille pas. Loin de là.

    Sous un autre angle, celui du libertinage d'esprit cette fois, on peut considérer que Dom Juan correspond moins à une personne réelle qu'à une pure projection fantasmatique. Une projection conduisant à une vérité remettant en question tout ce qui constitue le monde de l'époque. L'ultime épisode de l'intrigue n'est pas exempt de clichés qui parent le héros des masque de la damnation. Molière ne pousse pas jusqu'au bout son jeu qui le porte au défi. Il finit par se placer du même point de vue que ses prédécesseurs et reprend la charpente du mythe : « le tonnerre tombe avec grand bruit et de grands éclairs sur Dom Juan ; la terre s'ouvre et l'abîme ; et il sort de grands feux de l'endroit où il est tombé ». Il ne va pas plus loin.

Tout ne lui est pas permis, même par le roi Louis XIV.
Soucieux de ne pas justifier la défiance des censeurs, Molière n'a pas d'autre choix que de faire place nette en faisant disparaître son héros. Un effacement décrit par le supplicié lui-même : « Ô Ciel ! que sens-je ? Un feu invisible me brûle, je n'en puis plus, et tout mon corps devient un brasier ardent. Ah ! ». Pour Molière, le combat est perdu d'avance, il le sait. L'impiété de Dom Juan est clouée au pilori. Il subit les tourments physiques infligés par ses tortionnaires, bible à la main. On aurait tort d'opposer ici le libertinage des m½urs ou sexuel au libertinage de l'esprit, au rationalisme athée. Le libertin mondain ne montre aucune vénération à l'égard du mariage. Pour quelle raison ? Tout simplement parce que le mariage est un lien sacré et indissoluble aux yeux de l'Eglise. Il est le fondement de la dogmatique religieuse. Dom Juan prend systématiquement à contre-pied les codes établis par l'église chrétienne. Toutes les séquences de l'intrigue théâtrale relatent les étapes d'un procès conduisant à un verdict. D'où ce chassé-croisé fantasmatique de femme voilée, de la faucheuse et de la statue, dont les présences se frôlent dans le couloir de la mort. Tout se déroule comme si la mort du libertin n'était que le rêve des tenants de la doctrine chrétienne. A leurs yeux, le bûcher représente la forme d'exclusion la plus radicale. Le feu est une manière d'éliminer le corps de l'offenseur en le réduisant en cendres. Sganarelle prête sa voix aux magistrats de l'inquisition religieuse : « et je crois que le ciel, qui vous a souffert jusques ici, ne pourra souffrir du tout cette dernière horreur [...] Ah ! Monsieur, c'est le Ciel qui vous parle, et c'est un avis qu'il vous donne » (scène 4 de l'acte V). Il fait partie des appariteurs qui citent les inculpés devant le tribunal ecclésiastique. Il exerce le rôle du ministère public, il plaide au profit de l'autorité de l'église. On notera toutefois que  ni Sganarelle, ni le spectre n'évoquent la figure de Dieu. Censure oblige, c'est le mot « Ciel », employé par métonymie, qui est répété d'une réplique à l'autre (« la miséricorde du Ciel [...] les grâces du Ciel [...] Ciel offensé »). Sganarelle, par sa présence pataude, incarne surtout la domesticité de la pensée. Tout au long de la pièce, il endosse le rôle ridicule de directeur de conscience.
 
Pour Molière, qui n'est évidemment pas un dévot accroché aux soutanes (il est probablement plus proche des libertins), la liberté rime avec affrontement du néant. Dom Juan est un homme de dissidence qui impose une vision du destin : l'aventure humaine, c'est découvrir ce qu'on ne cherche pas. Pour lui, la liberté coïncide avec le renoncement à prendre appui sur quelque dogme que ce soit. Même si l'abîme s'entrouvre sous ses pieds, peu importe le lieu ou la manière dont les corps sont voués à disparaître. Dans l'épilogue de la pièce, une évidence s'impose pour qui sait lire : le ton n'est pas à la repentance. Dom Juan assume son athéisme avec panache. Il refuse de se conformer aux règles édictées par la chrétienté. Il faut le reconnaître, le personnage en lui-même ne manque pas de charisme. Dans le même temps, le dogmatisme religieux est mis en lumière en tant que refus de partager une autre lecture du monde. Les critiques portées par Dom Juan sur l'hypocrisie religieuse, la vanité des grands, sur les modes sociales sont parfaitement fondées.

   Et puis surtout, on imaginerait d'autres chatoiements à la fin de cette pièce que les jérémiades puériles de Sganarelle : « Mes gages ! mes gages ! mes gages ! » lâche-t-il en rafale à la fin de la scène 6.  Drôle de deuil que ce laquais un peu geignard s'oblige à porter. Cet ultime ajustement  dans cette scène dernière n'a rien d'insolite. L'insignifiant Sganarelle, rechigné, intéressé, si piètre dans son allure et ses basses préoccupations, ne parle pas d'assez haut pour être crédible. Cette répartie qui ne se montre pas à la hauteur des circonstances profite au propos ou au projet de Molière. On peut considérer que Molière, en insistant sur ces gages impayés, teste en quelque sorte les limites de sa vaillance. En tant qu'auteur dramatique, il risque gros.

En définitive, il fait assister son public non pas à une chute, mais à un triomphe.  Sans apaiser en quoi que ce soit la polémique, il rend plus ostensible la résistance de Dom Juan : « Non, non, rien n'est capable de m'imprimer de la terreur [...] Non, non, ile ne sera pas dit, quoi qu'il arrive, que je sois capable de me repentir » (scène 5). Jusqu'au bout, Molière n'a de cesse de mettre en valeur le courage et l'opiniâtreté de ses engagements. A aucun moment, le héros tragique ne se laisse questionner par l'irrationnel : « je veux éprouver avec mon épée si c'est un corps ou un esprit ». Il refuse de s'incliner devant les évidences prétendues d'un miracle.

Cette mise en scène, marquée par le désir de tourner en dérision la sottise et la crédulité des esprits superstitieux,  a une vocation pédagogique. Elle contribue à faire de l'auteur de la pièce un pionnier, un précurseur des philosophes du XVIIIème siècle.

Conclusion

Molière n'a pas l'habitude de faire des ronds de jambe à la société de son époque. Là où il fait croire à un divertissement (la pièce nous est présentée comme une « comédie »), il nous fait prendre conscience des enjeux de son spectacle. Le scénario, dépourvu de tout ressort comique, ne cherche pas à être crédible. La fiction fait surgir autour d'elle tout un monde fantasmatique. Points d'éclats de rire partagés dans ce combat lourd de périls pour le héros. La comédie, un spectacle qui prête à rire, devient bien sombre. Il n'en demeure pas moins que Molière ne regarde pas passer les poissons. Il se rit du pouvoir avec son aplomb habituel, nous rappelant que le théâtre a toujours été un espace de débat et de pensée.

Notes

 (1) la faucheuse est une allégorie de la mort, qui a été représentée dans les cultures populaires, depuis la lointaine Antiquité, par une figure anthropomorphe (personnification de la Mort sous la forme d'un être humain, d'une entité vivante, d'un squelette, d'un corps décomposé ou momifié, ou de la carcasse osseuse d'un squelettoïde) Dans le folklore occidental, ce squelette porte une toge de couleur noire avec capuche, brandissant parfois, de la main gauche, une grande faux. C'est pourquoi cet être terrifiant, macabre, venu happer les vivants d'un coup de lame  est connu sous le nom de la « Grande Faucheuse », ou plus simplement de « La Faucheuse ». Dans la mythologie grecque, la faucille était l'attribut du dieu Cronos (Saturne chez les Romains, le dieu boiteux armé d'une serpette), qui a privé son père Ouranos de ses organes sexuels (cette castration ou émasculation est à l'origine de la naissance de la déesse Aphrodite). Cet outil tranchant reste le symbole par excellence de la mort : c'est avec une faucille que le héros Persée tranche la tête de la Méduse, l'une des trois Gorgones avec Euryale et Sthéno (ses cheveux sont devenus des serpents et son regard pétrifie tous ceux qui le croisent). La faucille sera remplacée par la faux dans l'agriculture, à partir du XVème siècle, ce qui explique pourquoi elle apparaît entre les mains des squelettes à partir de la Renaissance (dans les textes bibliques, il est question de la faucille et non pas d'une faux, les symboles suivent l'évolution des outils et des technologies agricoles). La faux est une image allégorique de l'instrument aveugle qui coupe tout ce qui vit ; dans le jeu de Tarot, la lame de la Mort signifie plutôt la perte des illusions de ce monde. Squelette ambulant décharné ou présentant quelques rares lambeaux de peau et une chevelure absalonienne, hirsute, la  Faucheuse incarne la fin absolue et inévitable  de la vie, l'aspect périssable et destructible de notre existence. La mort est par nature angoissante, pas étonnant qu'elle soit représentée par un cadavre aux traits effrayants. Le droit de vie et de mort appartient aux dieux, chez les Grecs et les Romains. Les divinités léthifères sont représentées par Zeus (Jupiter), Arès (Mars), Hadès (Pluton), Hécate, Perséphone et Thanatos, fils de la nuit (Nyx)  et frère jumeau de Hypnos, dieu du sommeil.

Thanathos, fils d'Erèbe, le dieu des Ténèbres,  apparaît  sur les sculptures anciennes avec un visage défait et amaigri, les yeux fermés, couvert d'un voile, et tenant une faucille  à la main (la vie est moissonnée comme le blé dont on coupe brutalement la tige). On retrouve déjà les traits les plus hideux du squelette associé au thème de la fauchaison. Le squelette à corps de femme est la personnification de la mort, de la putréfaction et de la décomposition : elle arbore, elle affiche un sourire ironique, presque moqueur. La Faucheuse s'avance, comme une sultane : elle a une allure pensive, ce qui peut signifier que le squelette, lui, a franchi le seuil de l'inconnu et qu'il a percé le secret de la disparition. Si l'on en croit le poète berbère né en Numidie, Apulée (II° siècle de notre ère), dans la Rome antique circulaient des statuettes figurant un squelette, censées représenter le dieu psychopompe Hermès (Mercure), le dieu des Enfers. Dans les banquets, on jouait avec des pantins « squelettoïdes » articulés tout en exécutant des danses macabres pour mieux exciter les invités à jouir plus intensément des instants éphémères du plaisir (festine lente, disait Vespasien). Les fées de notre folklore (les Destinées, les Tria Fata) ne sont que les représentations modernes des Parques romaines, elles-mêmes transposition latine des Moires grecques. Assemblées par trois, les fées tirent du fuseau le fil de la destinée humaine, l'enroulent sur le rouet et le coupent de leurs ciseaux. Leurs origines remontent aux Kérès, des divinités infernales de la mythologie grecque, les filles de Nyx, sortes de Walkyries (divinités guerrières de la mythologie nordique au service du dieu Odin) qui happaient les agonisants sur les champs de bataille. Dans la mythologie grecque, les Moires (en grec ancien Μοῖραι, littéralement les « portions de destin assignées à chaque homme ») sont des divinités du Destin implacable. Elles sont assimilées aux trois Parques dans  la mythologie romaine. Elles portent chacune un nom : Clotho (Κλωθώ  «la Fileuse »), Lachésis (Λάχεσις  « la Répartitrice »,  celle qui enroule le fil autour de la pelote) et enfin Atropos (Ἄτροπος, « l'Implacable », celle qui coupe le fil). Comme les Parques des Romains, elles symbolisent les trois étapes de notre vie : la naissance, la maturité, et la vieillesse suivie de la mort.

DOM JUAN. ACTE V. SCENES 5, 6 et 7. AXES DE LECTURE.

(2) définition du mot « libertin » par l'Académie Française

LIBERTIN, -INE n. et adj. XVe siècle. Emprunté du latin libertinus, «affranchi »

Dans la langue classique, désignait une personne faisant profession soit de s'affranchir par la philosophie de l'autorité et des dogmes de la religion, soit de ne pas s'assujettir dans sa conduite aux pratiques et aux règles de la morale chrétienne (on parle dans le premier cas de libertins érudits, dans le second, de libertins de m½urs ; mais il est souvent arrivé que les deux attitudes se soient conjuguées). Les libertins athées et les libertins déistes. La Mothe Le Vayer, Gassendi furent des libertins érudits. Théophile de Viau, Chapelle furent des libertins de m½urs. Le don Juan de Molière est un libertin au sens le plus complet, dans sa pensée et dans sa vie. On a appelé aussi les libertins « esprits forts ». 2. Dans l'usage actuel. Personne de m½urs déréglées, dissolues. Un franc libertin.II. Adj. 1. Dans la langue classique. Qui est propre au libertin. Un courant libertin. Opinions, pensées libertines. Par ext. Qui agit sans contrainte, ne suit aucune règle. Une imagination libertine, vagabonde et sans frein. Humeur libertine. 2. Dans l'usage actuel. Dont la conduite est marquée par le désordre et la licence, dont les m½urs sont dissolues. Il est devenu fort libertin. Par ext. Mener une vie libertine. Des contes, des vers libertins, licencieux. Titre célèbre : L'Ingénue libertine, de Colette (1909).

LIBERTINAGE n. m. XVIIe siècle. Dérivé de libertin.1. Dans la langue classique. Rejet rationaliste ou sceptique des dogmes et des pratiques de la religion. Il faisait profession de libertinage. Le libertinage érudit. Par ext. Fantaisie déréglée d'une personne qui ne s'astreint à aucune règle ; légèreté, inconstance dans les idées. Cet écrivain s'abandonne à un libertinage d'imagination. Il se laisse aller à un libertinage d'esprit qui le fait passer d'un objet à un autre, sans s'arrêter à aucun. 2. Dans l'usage actuel. Dérèglement dans la conduite, dans les m½urs, né du refus des obligations morales. Tomber, vivre dans le libertinage. Un libertinage effréné, scandaleux.

Source :

https://academie.atilf.fr/

Autres études sur ce même corpus de textes tirés de la pièce "Dom Juan" :

https://bmirgain.skyrock.com/3319673358-DOM-JUAN-MOLIERE-GROUPEMENT-DE-TEXTES-SERIE-S-ES.html

https://bmirgain.skyrock.com/3317622720-L-ironie-ou-la-complicite-de-malfaisance-dans-Dom-Juan-de-Moliere.html

https://bmirgain.skyrock.com/3319673586-DOM-JUAN-ELOGE-DU-TABAC-PAR-SGANARELLE-AXES-DE-LECTURE.html

https://bmirgain.skyrock.com/3320437138-DOM-JUAN-LA-SCENE-DU-PAUVRE-ACTE-III-SCENE-2-AXES-DE-LECTURE.html

https://bmirgain.skyrock.com/3319701600-DOM-JUAN-MOLIERE-La-tirade-calomnieuse-de-Sganarelle-Acte-I-scene-1.html

https://bmirgain.skyrock.com/3246661674-GRILLE-DE-LECTURE-DOM-JUAN-RHINOCEROS-COMPARAISON-DES-PERSONNAGES-DANS.html

Liens avec d'autres études sur le libertinage :
 
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https://bmirgain.skyrock.com/3181294273-Les-Pensees-de-Pascal-Pascal-vu-par-Andre-Gide-Dissertation.html
 
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https://bmirgain.skyrock.com/2982754409-CREBILLON-sa-vie-son-oeuvre.html
 
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Autres études sur Molière :

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Liens avec d'autres écritures d'invention sur le théâtre :

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Etude du personnage de Dom Juan : le héros de la pièce vu cette fois par Sganarelle, du début de l'acte  I
 
     La réplique de Sganarelle a des allures de tirade : c'est  une bordée de critiques acerbes débitées à un rythme effréné.  Le dénigrement se décline sur un mode cumulatif, abusant du procédé de l'hyperbole (« terrible chose », « il me vaudrait bien mieux d'être au diable que d'être à lui »). Les tournures superlatives abondent également (« le plus grand scélérat que la terre ait jamais porté », « le plus grand scélérat »). Une cascade de mots péjoratifs ou dépréciatifs rythme cette plongée dans les méandres de la vie scabreuse de cet aristocrate aux talons rouges : « ...tu vois en Dom Juan, mon maître, le plus grand scélérat que la terre ait jamais porté, un enragé, un chien, un diable, un Turc, un hérétique ». A noter qu'une injure en valant une autre, les mots sont presque tous des synonymes (personnage parangon du sapajou libertin, du  séducteur débauché). Dom Juan, grand viveur et penseur jouissif,  est comparé à des animaux (« pourceau », « chien »). Ces deux derniers termes, aux connotations symboliques évidentes, font implicitement référence aux philosophes cyniques, soupçonnés jadis par les chrétiens de pratiquer la cynogamie. En outre, et ceci dès la protohistoire du christianisme,  les prédicateurs du Christ accusaient, les disciples de l'épicurisme de faire partie du « porcus gregarii Epicurii » (le troupeau des pourceaux d'Epicure). Le thème de la débauche sexuelle et de l'immoralité graveleuse est récurrent (la figure légendaire du sensuel « Sardanapale »). L'appétit sexuel de Dom Juan touche tout, aussi bien les jolies pucelles que les dames d'honneur de la Cour, la plèbe paysanne que la bourgeoisie  roturière. Sganarelle renchérit sur un ton nettement plus raboteux, scabreux : « il aurait épousé toi, son chien et son chat ». Tout y passe, échangisme, parties carrées, et même zoophilie ! Dom Juan, « épouseur à toutes mains », pratique l'union libre  (ce qu'on appelle les mariages de la main gauche). On l'aura admis : le valet, à bout d'inspiration,  vide son sac. Le spectateur comprend que ce dilettante, un coureur de jupons invétéré, s'adonne sans aucune retenue aux plaisirs de la chair : le comportement amoureux de ce rufian est incompatible avec la morale chrétienne ! Tout naturellement, Sganarelle va passer de l'image du libertin mondain à celle du rationaliste athée, du libre-penseur (libertinage de l'esprit). L'impiété de Dom Juan est clouée au pilori. Le laquais fait passer son maître pour un mécréant, un athée qui aurait vendu son âme au diable, « qui ne croit ni Ciel, ni Enfer, ni loup-garou ». Ce « grand seigneur méchant homme » est  un personnage de haute volée, somme toute assez inquiétant. Le philosophe Pascal rangeait les libertins parmi les « esprits forts ». C'est dans ce sens qu'il faut entendre l'expression « qui ferme l'oreille à toutes les remontrances qu'on lui peut faire, et traite de billevesées tout ce que nous croyons ». La force d'esprit de Dom Juan est au-dessus de toutes les croyances religieuses qu'il méprise, qu'il considère comme des superstitions stupides, et donc des impostures intellectuelles. L'aspect peu conventionnel de ce matérialiste défiant l'autorité divine du Christ ne peut que faire sursauter Gusman, le valet de pied, le domestique  de Done Elvire (« tu demeures surpris et changes de couleur à ce discours », fait observer Sganarelle),  et bien sûr les spectateurs de l'époque. Le portrait est-il sincère ? On peut en douter. Autrement dit, il ne faut pas se contenter d'une lecture au premier degré. Les serviteurs et valets sont tenus au devoir d'invisibilité et censés garder le secret au sujet de leur maître. Ce n'est pas le cas ici. Sganarelle semble persuadé d'être l'unique témoin de la dépravation morale de son seigneur.  Le valet maltraité par son maître et bourreau est-il de bonne foi ? Son témoignage reste  sujet à caution. Sganarelle souligne la  banalité du mal chez ce « méchant homme ». Simple constat ou propos de vieille concierge cancanière, rumeur malintentionnée de badauds ? Que penser de cette description du personnage éponyme de la pièce ? Un portrait à la croisée de la biographie ou de la fiction pure ? Le témoignage malveillant de Sganarelle, bien peu flatteur, dresse le portrait  d'un individu imbu de lui-même, corrompu, décadent, englué dans le vice, dans la débauche de satisfactions éphémères. D'un esprit fort qui  sème un désordre incommensurable dans les esprits. La domination intellectuelle de Dom Juan prend l'allure d'un envoûtement. Sganarelle s'enflamme, certes, mais trop braillard, il cabotine beaucoup, au point de faire tourner la tête au spectateur qui n'a pas une seconde de répit.

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#Posté le samedi 09 mars 2019 06:13

Modifié le jeudi 28 mars 2019 10:00

L'ironie ou la complicité de malfaisance dans Dom Juan de Molière

L'ironie ou la complicité de malfaisance dans Dom Juan

     La comédie « Dom Juan ou le Festin de pierre » fut représentée pour la première fois le 15 février 1665 sur le Théâtre de la Salle du Palais Royal, par la « Troupe de Monsieur » (Philippe de France, frère du roi Louis XIV, second fils de Louis XIII, né en 1640 et mort en 1701).

On peut considérer la pièce de Molière, à l'échelle macrostructurale,  comme une épitrope. Cette figure de style ou tour rhétorique consiste à adopter, par ironie, une posture impassible  où l'on va dans le sens de son récepteur avec excès, au-delà de ce qui serait raisonnable. Molière  inviterait donc son public à persévérer dans son erreur. Tout au moins, il ne laisse pas apercevoir le véritable point de vue qui est le sien.

D'où ces paroles sardoniques qui foisonnent dans les répliques de Dom Juan qui montre une moquerie amère, froide, distanciée, sur un ton sardonique. L'adjectif « sardonique » tient son nom d'une fleur, la renoncule de Sardaigne (« sardonia » ou « apium risus ») dont le goût provoque un rictus déplaisant sur le visage. Il va sans dire que « Dom Juan ou le Festin de pierre » a provoqué les mêmes réactions que cette renoncule en faisant grincer des dents le clergé de l'époque. Et bien plus que le Tartuffe, dont les trois premiers actes furent représentés devant Louis XIV en mai 1664, au cours des fêtes de l'Ile enchantée.

Personnages triés sur le volet

Le genre de la comédie, revendiqué par l'auteur, tient du jeu de la barbichette ou du poker menteur. Ce qui permet de faire passer la pilule. La contamination ironique se joue à l'échelle de toute l'½uvre. Pourquoi cette qualification de « comédie » en guise d'avertissement alors que la fin de la pièce se fonde sur un rapport tragique au monde ? En outre, l'orientation générale du propos paraît bien souvent sentencieuse, conciliant le sérieux et l'irrévérence.

La qualification du héros par le valet s'énonce par le biais de « l'argument de nomination » (Philippe Breton). Le laquais affuble son maître de toutes sortes de noms. En fait, il se contente de répéter toujours la même chose. De ressasser. L'insistance résulte de la répétition, de l'accumulation de termes dépréciatifs ou supposés tels. Il s'agit de disposer son auditoire comme il faut. Et pas seulement Gusman, l'écuyer d'Elvire. L'argument de dénomination se trouve ainsi renforcé par l'argument d'amplification. Toute l'argumentation de Sganarelle consiste à revenir sur un jugement déjà exprimé et à l'amplifier sans jamais se rétracter, à le renforcer par adjonction de termes péjoratifs, d'expressions hyperboliques. Cette manière de se montrer le plus exhaustif possible (inventaire par adjonction des vices du personnage éponyme) correspond à la figure de l'épanorthose. Celle-ci affecte le texte entier au point qu'elle le rend peu crédible. On ne saurait attacher un degré de vraisemblance à un dialogue qui relève de la boutade. Les propos goguenards de Sganarelle, cum grano salis, qui n'excluent pas l'obscénité, n'ont rien du calembour  mais plutôt de la boutade en tant que tournure d'esprit souvent proche de la contre-vérité. La boutade était autrefois une petite pièce écrite en vers dans le genre de la satire. Quel est l'effet visé par le dramaturge ?

Force est de conclure que l'exorde mémorable de Sganarelle transforme le héros en icône sacrificielle. Molière multiplie les signaux, les points de connivence avec son public acquis d'avance à sa cause.  Tout l'enjeu de la pièce se joue sur cette complicité de malfaisance. Tout repose sur un système subversif consistant à dissimuler autant que faire se peut une orientation idéologique.

D'un bout à l'autre de sa pièce, l'intrigue pétille de narquoise roublardise. Au milieu du XVIIème siècle, « parler narquois » voulait dire parler un jargon qui ne pouvait être entendu que par ceux qui sont d'intelligence entre eux. A l'image de l'arquin, ce soldat mendiant, qui défaisait en sifflotant les bandages de ses fausses blessures après avoir demandé l'aumône. Rien ne manque dans cette pièce, ni les traits de malice, ni les saillies de l'esprit avec un  zeste de raillerie. Molière, libertin lui-même, et qui n'est pas moine comme Tirso de Molina, défie le monde religieux tout en le ménageant un peu.

L'ironie résume l'½uvre tout entière, une ½uvre offensive qui s'en prend aux normes, aux conventions sociales et morales auxquelles sont aliénés les gens de l'époque.

Tout ce qui concerne le sacré devient loufoque, à commencer par l'interdiction du tabac. L'éloge du tabac cherche à abaisser, à disqualifier les interdits de l'Eglise en le tournant en ridicule. Il n'y a pas de mal à se faire du bien. Ce que reformulera plus tard Camus : « il n'y a pas de honte à préférer le bonheur » (« La peste » - 1947).

Molière, sans rien vouloir démontrer, met en scène des personnages qui ne font que caricaturer à grands traits l'esprit libertin, sans se remettre en cause. Sauf que l'arrogance du patibulaire Sganarelle patibulaire n'a rien de contagieux. Cette arrogance vise à signaler les malfaisants. Il ne dit pas les choses de façon douce. Sa rhétorique tourne le dos à l'euphémisme. Sganarelle, en frimeur survolté jubilant en scène, entraîne son auditoire dans une sulfureuse descente aux enfers, dans la fournaise du stupre. Il est sûr de son fait, comme s'il s'agissait de mettre tout le monde d'accord sur l'identité véritable de l'abominable libertin et le constat de sa dégénérescence morale. Tout y passe, avec méthode et méticulosité : les frasques  de l'amour libre, les détails scabreux, les allusions attendues, l'étalage de l'intimité scatologique d'un homme qui se soumet par perversion aux instincts les plus bestiaux. Un témoignage qui claque, où l'anecdotique voisine avec l'outrage.

Le valet de Dom Juan tire un portrait aux accents accusateurs tout en tremblant devant un public qu'on devine extatique. La crainte qu'il éprouve (« la crainte en moi fait l'office du zèle... » - acte I, scène 2), par effet miroir, peut être mise en parallèle avec la paralysie du public pâlissant d'effroi. La tirade de Sganarelle rend compte du  regard de toute une société. Dans cette salle du Palais Royal, les nobles courtisans du parterre devaient sentir leurs jambes flageoler. Finalement, Sganarelle n'est rien d'autre que le commanditaire d'un clergé tout puissant qui assure le verrouillage policier de la société d'alors. Il dénonce son maître sans vergogne.

Sauf que cette dénonciation aboutit au résultat inverse en mettant en avant, par empathie, un goût pour des personnages antipathiques accusés de paganisme par les religieux.  L'accusation tombe d'elle-même. Le spectateur, trop bien informé déjà par le statut de Sganarelle, comprend d'emblée que le valet incarne le peuple crédule qui mêle d'ailleurs les superstitions à la croyance religieuse. Il peut douter de la hauteur de réflexion du domestique. Les paroles de Sganarelle sont privées de toute autorité scripturaire. Le personnage du valet en livrée perd son crédit dans sa toute dernière réplique où il affiche des préoccupations peu scrupuleuses de petit boutiquier : « Ah ! mes gages ! mes gages ! [...] Il n'y a que moi seul de malheureux. Mes gages ! Mes gages ! Mes gages ! ». Une dernière charge à la baïonnette contre l'immunité fiscale du clergé ? Il reste que Sganarelle s'affiche dans la scène 6 de l'acte V comme un moralisateur au service des ministres des autels, un prélat domestique dévoué au Saint-Siège, donc un allié providentiel, apostolique de l'autorité doctrinale.  Emissaire de l'Eglise, coadjuteur des nonces et archevêques, il défend les intérêts du Clergé de France. Garant de la morale chrétienne, il condamne l'amour libre. Il se sent d'accord avec le glossaire du  corps ecclésiastique dont il racle les fonds de cuve en pleurant le sort des « filles séduites », des « familles déshonorées », et des « femmes mises à mal » (acte V scène 6).
 
Le diable entre sur la scène : der Sieg über das Böse.

         Les discours des uns et des autres contiennent  des vérités qui ne supportent pas la moindre contradiction. Il n'est guère surprenant, dès lors, que Molière fasse surgir, à rebrousse-poil,  le paradoxe, sous la forme de reparties foudroyantes. Dans son scénario, il y a d'une part ceux qui s'engagent dans une démarche de consolidation des vérités de l'Eglise, et d'autre part les mécréants qui ne respectent rien. Schéma que viendra contredire la scène du pauvre (scène 2 de l'acte III), qui relève éminemment d'une ironie toute voltairienne.

L'auteur redouble ses coups face à tout ce qui anesthésie la pensée, à tout ce qui l'endort. La faculté de penser librement, le libre arbitre sont incompatibles  avec la foi. Molière semble dire à son public : ce n'est pas parce que vous êtes indignés que vous avez raison ! Voltaire reprendra la même idée dans ses  « Lettres philosophiques » (1734) : « L'intérêt que j'ai à croire une chose n'est pas une preuve de l'existence de cette chose ». 

         Somme toute, il faut bien considérer qu'à l'époque de Louis XIV, la religion est une prescription face à laquelle on ne saurait se dérober. Avec  laquelle, en tous les cas, il faut composer. Ce qui la désigne aux sarcasmes. Par son intelligence rusée, Dom Juan retourne à son profit le point de vue de ses adversaires. Le sarcasme, arc-bouté sur une posture philosophique, en tant que ressort dramatique, implique une stratégie. Fondé sur le grec sarkasmos, le mot doit son sens à une mimique consistant à ouvrir la bouche pour montrer les dents. User de sarcasmes, c'est mordre dans  la chair.   

Cet esprit de dérision blasphématoire impose une dissociation entre deux plans énonciatifs : il faut distinguer ce qui relève d'une part des échanges entre les personnages sur le plateau de scène et d'autre part de la relation auteur-spectateur. Les dernières répliques plutôt abâtardies de Sganarelle prétendent à un juste retour des choses en soulignant la justice de la sanction subie par son maître. Elles peuvent être mises au compte d'une ironie théâtrale (Sganarelle : « J'espérais toujours de votre salut : mais c'est maintenant que j'en désespère ; et je crois que le ciel, qui vous a souffert jusques ici, ne pourra souffrir du tout cette dernière horreur » - scène 4 de l'acte V).

Le double sens de ce propos ne peut être compris par aucun des personnages mais seulement par le public. L'intention railleuse  de cette ironie « auctoriale »  consiste à laisser le spectateur penser par lui-même. L'ironie intellectuelle, en période de persécution des penseurs libertins, pouvait difficilement échapper au public lettré de l'époque. Seul quelque novice borné aura la candeur d'admettre ouvertement que le châtiment de Dom Juan est exemplaire et bien mérité. La pièce, qui respire la cautèle,  fut retirée de la scène par Molière lui-même après une quinzaine de représentations et ne sera jamais plus jouée de son vivant.

Dom Juan, un personnage métaphorique

Le théâtre chez Molière est une forme d'argumentation, subtile car elle mobilise l'intelligence en jouant sur ce deuxième degré. La pratique de l'ironie et du second degré est élevé au rang d'un art. Un art du combat pour désorienter, déstabiliser, dérouter, voire mettre à terre l'ennemi juré. Et Molière tourne autour de son adversaire, avec une impassibilité mature, jusqu'à trouver les failles dans les médiocres illusions des humains. Il essaye de mettre le spectateur de son côté, en faisant éclater tous les conformismes.

L'interrogation est au c½ur de l'ironie socratique, toujours à l'affût des pensées à contre-courant de l'opinion de la majorité. Dans le milieu potinier de ce « palais »,  les défroques crapuleuses dont est paré le héros Dom Juan représentent  autant de costumes de scène pour rendre compte, tout en jouant avec l'ambivalence morale,  du libertinage d'esprit. La manière la plus sûre de faire aboutir ce projet de réhabilitation de l'esprit libertin consiste à amener le traître, le transfuge, à faire partie des repentis. Molière fait partie de la race des artistes qui sapent l'ordre. Cette ½uvre aussi libre, aussi personnelle que sincère illustre la prétention du théâtre à vouloir changer le monde. A engendrer une nouvelle vision du monde qui permettra aux Lumières du siècle suivant de prendre leur élan.

Dom Juan incarne l'intelligence en action, qui affronte la facilité des idées toutes faites, les préjugés enracinés dans la conscience des superstitieux. C'est donc un homme dangereux. De facto, ses convictions constituent un acte d'émancipation qui repose sur des idées proches de celles de la Révolution française.

La fabrique du personnage repose sur un rapprochement, une ellipse d'analogie. Une analogie qui oscille « entre la ressemblance qu'elle signifie et la dissemblance qu'elle enjambe » (Philibert Secretan). Tout le personnage de Dom Juan, entouré de ses meilleurs détracteurs,  est construit par opposition radicale aux relations que chacun doit entretenir - dans le contexte particulier de l'auditoire du siècle de Louis XIV - avec la tutelle divine : respect, soumission et reconnaissance de l'autorité. 
 
Conclusion
 
  Le registre affiché, celui de la « comédie », ne procède certainement pas d'une intention burlesque : l'½uvre est marquée du fer rouge des choix philosophiques de Molière. L'ironie, figure par excellence de l'inversion,  opère un renversement de perspective : toutes les activités de parole dans cette pièce reposent sur le simulacre. Pas surprenant que la fin de l'intrigue mette en scène, elle aussi,  un simulacre. D'où le sous-titre, le « Festin de pierre », qui oblige au même décryptage. L'humour noir affleure dans l'épilogue. Comme le prétendait Otto Julius Bierbaum [1865-1910], « humor ist, wenn man trotzdem lacht ». Et on peut rire, en effet, de la représentation de la mort dans la scène 5 de l'acte V.

Quel autre but s'est proposé Molière, sinon de réactiver la « mémorialité » du libertinage philosophique dans le mouvement de l'histoire ? Dans cette confrontation au vide, Molière se montre sincère en donnant à voir le sort de ceux qui n'ont pas choisie la voie tracée. Dom Juan, un homme à femmes ? Un libertin patenté - l'opéra de Mozart fera tenir le registre de ses innombrables conquêtes - poursuivant les femmes de ses assiduités ? Un roué  condamné à une exécution aussi expéditive qu'une lettre de cachet ? Ou bien un acteur essentiel d'une mutation historique profonde ? Le libertinage philosophique, une théologie du nihilisme le plus lucide, hante l'esprit de Sganarelle ou de Dom Louis.
 
Dom Juan est un être complexe qui inspire bien d'autres sentiments que le mépris de Sganarelle. Il se livre à un jeu radicalement aristocratique en ferraillant de bout en bout avec les franges puritaine de la société, en se plaçant dans le camp des esprits forts, des imbattables, de ceux qui savent perdre avec classe. Face à une Eglise catholique intolérante, il bouscule le contrôle social exercé par le clergé omnipotent. Les prêtres de paroisse n'accordent pas plus de libertés sexuelles aux femmes qu'ils ne reconnaissent l'homosexualité. Dom Juan ne cesse d'affirmer ses choix, infiniment supérieurs aux lubies de ses détracteurs. Celui des amours hédonistes... En définitive, les joutes amoureuses se mêlent aussi au combat des idées. Molière place face à face l'hédonisme et le puritanisme. Dans la scène IV de l'acte IV, Dom Louis tente d'amener son fils à résipiscence. La fin de la pièce ne verra ni conversion, ni rédemption et surtout pas de repentance. Dom Juan meurt dans un feu de braises ardentes. Ce qui peut rappeler, de loin, l'interdiction de la crémation par l'Eglise. La dépouille mortelle de Dom Juan n'aura droit à aucune sépulture dans les jardins mortuaires (tout comme celle de Molière), ni à aucune messe de requiem. En revanche, la pièce en elle-même est une manière pour Molière de célébrer pontificalement la grandeur de son  héros. Un esprit libre qui sape à la racine les gardiens du dogme.  Le fait de tomber au combat pour ses idées n'est-il pas un geste héroïque ? Et puis, plus fondamentalement, pour Dom Juan, le corps vaut plus que l'âme. Ce qui revient à proclamer la primauté de la vie sur l'au-delà, de la liberté sur la soumission, de la jouissance sur la promesse d'une béatitude éternelle. Molière casse le monopole  du discours religieux en mettant en avant l'indéniable charisme de son personnage. La dignité apostolique est peut-être sauve. Un schisme étouffé vaut bien la paix du royaume. Ce que concèdera Goethe : « Lieber eine Ungerechtigkeit begehen als Unordnung ertragen ». Il vaut mieux une grande injustice qu'un petit désordre ... Mais ceci dit, la préséance du clergé est clairement mise en cause dans la pièce. Une pièce écrite, incontestablement, dans un réel climat d'adversité.  Molière n'est pas Tirso de Molina. Et sous le règne de Louis XIV, le clergé  fait partie des Etats Généraux et donc de l'ordre politique, avec l'objectif de combattre le paganisme.

La pièce « Dom Juan ou le Festin de Pierre », à n'en pas douter, sert de stèle commémorative à l'hérésie qui tente de se frayer un chemin dans le matériau théâtral.  Si l'on part du principe que la pensée libre est une hérésie...

¼uvres littéraires sur le même thème :

* « Jacques le fataliste », « La Religieuse » de Diderot [1713-1784]

* « Les liaisons dangereuses » de Pierre Choderlos de Laclos (1782)

* « La Religieuse », film de Jacques Rivette, tourné à la Chartreuse d'Avignon,  (avec Anna Karina dans le rôle de Suzanne Simonin et Micheline Presle), censuré par le Secrétaire d'Etat à l'Information Yvon Bourges qui prononcera l'interdiction de diffusion 1eravril 1966.
 
L'ironie ou la complicité de malfaisance dans  Dom Juan de Molière
Sujet de dissertation
 
La tragédie prend naissance lorsqu'on ne peut ni avancer ni reculer. Qu'en pensez-vous ?
 
Lien avec l'étude de tous les textes en classe

Le groupement de 4 textes

https://bmirgain.skyrock.com/3319673358-DOM-JUAN-MOLIERE-GROUPEMENT-DE-TEXTES-SERIE-S-ES.html

Analyse et axes de lecture du texte 1

https://bmirgain.skyrock.com/3319673586-DOM-JUAN-ELOGE-DU-TABAC-PAR-SGANARELLE-AXES-DE-LECTURE.html


Analyse et axes de lecture du texte 2

https://bmirgain.skyrock.com/3319701600-DOM-JUAN-MOLIERE-La-tirade-calomnieuse-de-Sganarelle-Acte-I-scene-1.html

Analyse et axes de lecture du texte 3

https://bmirgain.skyrock.com/3320437138-DOM-JUAN-LA-SCENE-DU-PAUVRE-ACTE-III-SCENE-2-AXES-DE-LECTURE.html


Analyse et axes de lecture du texte 4
https://bmirgain.skyrock.com/3321296598-DOM-JUAN-ACTE-V-SCENES-5-6-et-7-AXES-DE-LECTURE.html

https://bmirgain.skyrock.com/126.html

Confrontation des pièces "Dom Juan" et "Rhinocéros" :

https://bmirgain.skyrock.com/3246661674-GRILLE-DE-LECTURE-DOM-JUAN-RHINOCEROS-COMPARAISON-DES-PERSONNAGES-DANS.html


Synthèse sur l'angle d'approche de "Dom Juan" de Molière :

https://bmirgain.skyrock.com/3317622720-L-ironie-ou-la-complicite-de-malfaisance-dans-Dom-Juan-de-Moliere.html



Liens avec d'autres études sur le libertinage :
 
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https://bmirgain.skyrock.com/2975363025-La-censure-au-siecle-des-Lumieres.html
 
https://bmirgain.skyrock.com/2975584463-Critique-et-affaires-de-blaspheme-a-l-epoque-des-Lumieres.html
 
https://bmirgain.skyrock.com/1419638115-3-ETUDES-CONTE-L-INGENU-DE-VOLTAIRE.html
 
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L'ironie ou la complicité de malfaisance dans  Dom Juan de Molière

Adresses du jour : la cinémathèque des réalisateurs
 
https://www.lacinetek.com/fr/3-tous-les-films

https://boutique.ina.fr/

https://boutique-comedie-francaise.fr/

Lecture conseillée

*"L'ironie mise en trope. Du sens des énoncés hyperboliques et ironiques". Laurent Perrin. Editions Kimé. 1996

https://laurentperrin.com/lironie-mise-en-trope-du-sens-des-enonces-hyperboliques-et-ironiques/28/

*Le travail des morts" de Thomas W. Laqueur. Editions Gallimard. 2018

L'ironie ou la complicité de malfaisance dans  Dom Juan de Molière
 
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#Posté le mardi 23 octobre 2018 06:20

Modifié le mercredi 19 juin 2019 06:00

LA LECTURE SUR INTERNET

             Le livre parlant, un objet culturel comme les autres
 
                 Les donneurs de voix et la narration orale
 
Les enregistrements audio sont devenus aujourd'hui disponibles à partir d'un simple clic de souris. Une quantité importante d'informations se trouve gratuitement accessible sur internet. Le Podcast permet d'étancher une soif d'apprendre, de découvrir la littérature. C'est un loisir passionnant, mais pas seulement. La navigation en ligne nous permet d'écouter au casque des histoires. Ce qui paraît fort pratique pour les trajets en voiture, en train, en métro, en bus. Toutes les fonctionnalités ou sollicitations en ligne consacrées à la lecture nous font aussi gagner du temps. Un temps qui sera en plus bien utilisé.  Faire le plein d'histoires en ouvrant les oreilles est une activité fort productive, parce qu'elle se fonde sur nos envies. Sur un désir d'apprentissage.
 
Grâce à ces applications spécifiques, un roman, par exemple, peut se lire comme un feuilleton radiophonique (« Le diable au corps » de Raymond Radiguet, lu par René Depasse). Ce  face-à-face intime avec  les ½uvres littéraires renouvelle le rituel des lectures à haute voix des parents, de la nourrice, de la maîtresse d'école, remplacés désormais par des assistants vocaux (ou « donneurs de voix »).
 
L'accès à ces contenus va en outre stimuler nos réflexes attentionnels. C'est une manière de retenir, de focaliser l'attention et de développer les capacités de notre cerveau. La lecture publique à haute voix représente en France 1% du chiffre d'affaires des éditeurs (contre 12% en Suède et 10% outre-Atlantique). Le site https://www.audible.fr/ recense 250 000 titres de livres audio (dont plus de 9000 en langue française).
 
Il nous reste à choisir avec attention à qui nous accordons notre attention...
 
* Pour mieux saisir les opportunités offertes par le Web, voici les adresses de quelques plateformes de téléchargement :

http://www.litteratureaudio.com/
 
http://victoria-aufildeslectures.blogspot.com/
 
https://www.audiocite.net/
 
http://www.bibliboom.com/
 
https://www.audiolib.fr/
 
https://www.editionstheleme.com/
 
https://www.lizzie.audio/

Nota bene

Le livre numérique en 2018 représente 19 % du marché de l'édition aux U.S.A. (25 % en 2014). En France, il n'a jamais dépassé la barre de 5 % des parts de marché. Le nombre de Français qui possèdent une liseuse, type e-books ou liseuse Kindle, n'évolue plus (2%). En Europe, le Danemark est en tête avec 18% du marché.

A la fin de sa vie, par un codicille daté de 1881, le poète Victor Hugo [1802-1885] a donné tous ses manuscrits et dessins à la Bibliothèque de Paris en souhaitant qu'elle devienne un jour « la Bibliothèque des Etats-Unis d'Europe ». Tous ses manuscrits numérisés se trouvent sur le site :

https://gallica.bnf.fr/essentiels/hugo

LA LECTURE SUR INTERNET

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#Posté le jeudi 01 novembre 2018 09:30

Modifié le dimanche 26 mai 2019 06:16

MARION AUBERT. REMI DE VOS. THEÂTRE.

                             SCENE DE LA VIE FAMILIALE
 
                               de Marion Aubert (2010)
 
Les Atrides
 
- la punition -
 
L'ENFANT.  MEUMEU !  MEUMEU !
 
LA MARIÉE.  Non, ne le menace pas avec le lit tu sais, il ne faut pas que la chambre devienne une punition, c'est important tu sais, je l'ai lu dans un manuel d'éducation, non, pas la cuisine non plus tu sais, il pourrait ne plus manger, et nous faire des colères, et que deviendrions-nous, s'il ne mange plus?  Ah non non non, pas la cave non plus, le couloir, c'est peut-être une bonne idée, le couloir !
 
L'ENFANT.  MEUMEU !  MEUMEU !
 
LA MARIÉE.  Arrête s'il te plaît, mon chéri, arrête, sois gentil je t'en supplie, il ne faut pas craquer surtout, ne pas céder à l'émotion, aux coups, aux cris, ils le disent dans le livre, non, le mieux, c'est de l'ignorer, faire comme s'il n'existait pas, allez, viens, on l'ignore, on l'ignore tous les deux ensemble, on n'a qu'à se mettre dans sa chambre, et l'ignorer, on n'a qu'à se cacher tous les deux, on verra bien comme il réagit, allez, viens, on se cache tous les deux, c'est drôle comme il pleure, c'est drôle, pas plus de quelques minutes, ils le disent dans le livre, quelques minutes à peine suffisent pour lui faire comprendre, une bonne leçon, on t'a donné une bonne leçon avec papa, tu as vu comme tu es bien élevé, maintenant ?  Tu as eu peur d'être abandonné, ha ha, tu ne dis plus rien maintenant, ha ha, morveux, tu as eu la frousse, et tu sais ce que tu auras, la prochaine fois ?  Une bonne torgnole!  Ha ha!  Bon, à quoi tu veux jouer, maintenant, mon chéri ? Est-ce que tu ne voudrais pas lire un petit livre avec maman ? T'instruire avec maman ? Viens lire avec maman!  Ah non, les Lego, c'est papa, maman, elle ne joue pas aux Lego, maman, bon, j'en ai marre de lui, qu'est-ce qu'on en fait ? je n'arrive pas à me reposer, dans cette maison, je n'ai jamais mon compte d'heures avec lui, depuis que tu es né, je fais des rêves horribles, toc toc, c'est les voisins !
 
LES VOISINS. 
Bonjour, est-ce que vous êtes madame Auberte ? Je viens vous apporter ce bouquet de roses de la part d'un admirateur de l'étage du dessous !
 
L'ENFANT.  MEUMEU !  MEUMEU !
 
LE MARIÉ.  Qu'est-ce que c'est, ces roses?
 
LA MARIÉE.  "C'est rien !" je dis.  "T'occupe, c'est un service que j'ai rendu ! "
 
LE MARIÉ.  Tu rends des services maintenant ? Je me demande bien quels services tu peux rendre, tu n'as jamais rendu de services à quiconque, on les  compte sur les doigts, les services que tu as rendus !
 
L'ENFANT.  MEUMEU !  MFUMEU !
 
LA MARIÉE.  J'ai aidé pour un déménagement !
LE MARIÉ.  Qui ?  Qui déménage ?
LA MARIÉE. Je te l'ai dit, mais tu n'as pas écouté, tu m'as dit : "Oui, oui !" mais tu ne m'as pas écoutée, tu ne m'écoutes plus de toute façon maintenant, j'en ai pris mon parti de ne pas être heureuse, dans cette maison!
 
L'ENFANT.  J'aimerais attirer leur attention, là, faire un exploit, quelque chose d'exceptionnel, je pourrais peut-être faire un miracle et marcher dans mon caca, je vais jeter Doudou dans les toilettes !
 
LA MARIÉE.  Qu'est-ce qu'il fait ?  Regarde !  Oh !  Regarde !  Il baptise Doudou !  Ce n'est pas un baptistère, les toilettes, mon chéri, regarde-le, il se croit à l'église, il prie, il est tout auréolé de lumière, tu ne le trouves pas tout auréolé, cet enfant ?
 
L'ENFANT.  Maintenant, je vais mettre les mains dans les plantes, dans les pots de terre !
 
LA MARIÉE.  Ah non, ne déterre pas les plantes, mon chéri, je ne suis pas d'accord, je suis très affirmative et très autoritaire, je ne céderai pas sur les plantes, interviens, toi, au lieu de me laisser toujours intervenir, est-ce que ça n'est pas dans tes objectifs de couple de soutenir ta femme ? Est-ce que tu aurais oublié tous tes objectifs de couple ?  Nous ne savons même pas dans combien de temps le malheur va nous frapper, le malheur va nous frapper en pleine crise de couple, est-ce que tu ne trouves pas ça particulièrement idiot ? C'est dans tous les milieux, les problèmes, il nous l'a dit, Gilou, c'est son métier, on est un milieu propice pour les problèmes !
 
GILOU.  Vous êtes un milieu particulièrement propice pour les problèmes, les problèmes vont bien se développer, chez vous!
 
LA MARIÉE.  Il a dit ça, Gilou, il a toujours préféré user d'un franc-parler avec toi :
 
GILOU.  Ta femme, elle va te causer des problèmes.
 
LA MARIÉE. Juste à ma façon de bouger, il a dit ça, juste à mon allure, les bras qui ballottent trop, il a dit ça :
 
GILOU.  Tu vois, cette fille, elle a les bras qui ballottent trop.
 
LA MARIÉE.  Qu'est-ce que j'y peux, moi, de mes bras qui ballottent ?
 
*« Orgueil, poursuite et décapitation » - Marion Aubert - Actes sud-papiers

« Un enfant » - Furioso - Remi De Vos
 
L'HOMME.  Je ne sais pas si je tiendrai longtemps moi
LA FEMME.  Ah bon ?
L'HOMME.  Je sais pas
LA FEMME.  Qu'est-ce que ça veut dire ça ?
L'HOMME.  Ca veut dire que je sais pas si je tiendrai encore longtemps
LA FEMME.  Tu sais pas ?
L'HOMME.  Non
LA FEMME.  Et tu proposes quoi ?
L'HOMME.  On pourrait le perdre
Elle le regarde
LA FEMME.  Ah ouais ? Comment tu vois ça ?
L'HOMME.  Une balade en forêt et hop
LA FEMME.  Il gueule tellement qu'on le retrouvera tout de suite
L'HOMME.  Il pourrait faire une fugue
LA FEMME. Retrouver une copine de vacances ?
L'HOMME.  Pourquoi pas ?
LA FEMME.  Il tape ses copines de vacances
                Un temps
L'HOMME.  Tu sais quoi ? J'en peux plus
LA FEMME.  Si tu essayais de rentrer en contact avec lui ?
L'HOMME.  Il a quatre ans
LA FEMME.  Cinq
L'HOMME.  Il a déjà cinq ans ?
[...]
LA FEMME.  Hein ?
L'HOMME.  Dis.
Elle le regarde.
LA FEMME.  Oh ben alors
L'HOMME.  Oui oh ben alors d'accord
LA FEMME.  Quoi oui oh ben alors d'accord ?
L'HOMME.  Quoi quoi oui oh ben alors d'accord?  D'accord quoi? Quoi d'accord?  Quoi oui oh ben alors d'accord d'accord?
Elle le regarde.
LA FEMME.  C'est pas possible ça
L'HOMME.  Ça devient plus vivable
LA FEMME.  Non
L'HOMME.  Faudrait envisager une garde alternée
LA FEMME. C'est déjà un peu ça non ?
L'HOMME.  Le prendre chacun son tour
LA FEMME.  Tu veux dire quoi ? À tour de rôle?
L'HOMME.  Je le prendrai un week-end sur deux
LA FEMME.  Aussi pendant les vacances
L'HOMME.  Pas toutes les vacances
LA FEMME.  Ah ben si
Il la regarde.
L'HOMME.  Ça veut dire qu'on se sépare?
LA FEMME.  On est déjà séparés
L'HOMME.  Ah bon? Je m'en étais pas rendu compte
LA FEMME.  On fait plus rien ensemble
L'HOMME.  On dort quand même
LA FEMME.  Avec lui entre nous
L'HOMME.  Alors ça aussi
LA FEMME.  Même que tu le gênes avec tes ronflements
L'HOMME.  Il veut que j'aille dormir ailleurs
LA FEMME.  Il est pas le seul
L'HOMME.  Tu vois ?  Toi aussi t'es d'accord
LA FEMME.  Ce serait mieux que t'ailles dormir ailleurs
Un temps.
L'HOMME.  Si on m'avait dit que ce serait comme ça
LA FEMME.  C'est souvent comme ça
Il la regarde.
L'HOMME.  Il dort avec toi et je fais la cuisine ?
LA FEMME.  Qu'est-ce que tu veux que je te dise?
L'HOMME.  Si tu trouves ça normal
Un temps.
LA FEMME.  On se sépare alors?
L'HOMME.  Ce sera mieux pour tout le monde
LA FEMME. Ça me fait quelque chose
L'HOMME.  Ah bon?
LA FEMME.  Ben quand même
L'HOMME.  Tu m'aimes?
LA FEMME.  Ben
Il la regarde.
L'HOMME.  On pourrait se voir pendant qu'il est à l'école ?
LA FEMME.  Comme des amants tu veux dire?
L'HOMME.  On peut aller à l'hôtel
LA FEMME.  Pour...... ?
L'HOMME.  Ben oui
LA FEMME.  Quand ?
L'HOMME.  Après ton travail
LA FEMME. Je vais le chercher en sortant du travail
L'HOMME.  Pendant ta pause déjeuner?
LA FEMME.  Faut quand même que je mange
L'HOMME.  Non mais pas tous les jours
LA FEMME. Ça pose quand même des complications
L'HOMME.  .  L'idée c'est de plus vivre ensemble avec lui
LA FEMME.  Se séparer quoi
Un temps.
L'HOMME.   T'es triste?
LA FEMME.  Non c'est
L'HOMME.  Je propose des trucs
LA FEMME.  Tu m'aimes?
L'HOMME.  C'est pas la question
LA FEMME.  Non
Un temps.
L'HOMME.  Se séparer c'est tout
LA FEMME.  Faut encore qu'il soit d'accord
Il la regarde.
L'HOMME.  On n'est peut-être pas obligés d'avoir son autorisation pour ça
LA FEMME.  T'as envie de l'entendre gueuler?
L'HOMME.  Je ne veux plus jamais l'entendre gueuler
LA FEMME.  Moi non plus
L'HOMME.  Jamais
L'HOMME.  Je finirai par le tuer
LA FEMME.  Que de la gueule
Ils écoutent le dessin animé
L'HOMME.  Alors ? On se sépare ? C'est bon ? Fini ?
LA FEMME.  C'est lui qui décide
Noir.
 
« Trois ruptures », sketche de l'auteur Rémi De Vos
Actes Sud-Papiers - mars 2014
 
Rémi De Vos est un auteur dramatique français né en 1963 à Dunkerque.
 
Lien avec travaux précédents :
 
https://bmirgain.skyrock.com/3307827156-REMI-DE-VOS-TROIS-RUPTURES-UN-ENFANT-COMMENTAIRE-LITTERAIRE.html



Commentaire littéraire du texte de Remi De Vos
 
Les trois étapes de l'introduction
 
[premier alinéa qui présente l'auteur et son ½uvre]
         Le dramaturge Rémi De Vos, né à Dunkerque en 1963,  s'est imposé ses dernières années comme une figure majeure de la vie théâtrale en France. Sa création qui a pour titre « Trois ruptures », publiée en 2014, fait partie du répertoire contemporain, mais aussi des spectacles qui sont fréquemment  à l'affiche dans les festivals et tournées théâtrales d'aujourdhui. Des spectacles qui font beaucoup parler d'eux.
 
[deuxième alinéa dans l'introduction : on résume brièvement le contenu du texte que l'on doit analyser]
          Rémi De Vos, un auteur anti-conformiste  et attaché à la culture populaire, met au point un modèle de comédie noire, écrit pour tout public. Cette scène d'appartement, à l'apparente simplicité, évoque les affres de la vie maritale, empoisonnée  par un enfant qui fait la loi à la maison. Un petit avorton, du genre casse-pieds, qui fait la pluie et le beau temps dans le foyer, est devenu le centre du monde et tyrannise ses parents. C'est ce thème glaçant, étonnamment dans l'air du temps, celui de l'enfant tyran, de l'enfant roi, qui sert de trame au déroulement des faits.
[annonce du plan de son commentaire]
         Nous montrerons, dans un premier temps, que le dramaturge brosse avec gourmandise le portrait de ces parents démunis, de ce couple frustré qui cède au moindre caprice de leur enfant chéri. Il met en scène une souffrance familiale. Nous expliquerons pourquoi le père et la mère, qui traversent  des moments d'accablement existentiel, vivent un enfer. Dans un deuxième temps, nous mettrons en évidence les intentions de l'auteur qui laisse entendre les voix d'un homme et d'une femme. Par ce biais, il parvient à composer des dialogues savoureux, à consigner des relations cabossées avec une redoutable efficacité.

I. Une histoire de couple
 
A. Le récit d'une  séquestration : des êtres qui hésitent à se perdre tout à fait de vue
 
Dès les premières lignes, les déclarations fantasques du mari et de sa femme nous mettent au parfum : ils revendiquent l'un et l'autre le droit d'être libres. Ils vivent dans un quotidien fatigué par l'irruption d'un enfant, qui par ailleurs ne cesse de hurler ou de pleurer. Les relations au sein du foyer sont bouleversées parce que ce petit gosse insupportable est le maître du jeu. Le père, nerveux, au bord de la paranoïa, ne supporte plus les braillements, les pleurnicheries ou jérémiades de son garçon. Le gamin commence à lui taper sur les nerfs. Ne s'agit-il que d'un petit coup de fatigue, au creux de l'hiver ? D'un passage à vide ? Toujours est-il que le père tourne en rond et surtout pas très rond. Une situation qui ne joue pas en faveur du rejeton ! Le père, exaspéré par le ramdam de son fils, n'a qu'une envie : prendre le large... Mais comment changer d'air ? Les parents, on le sait, n'ont pas le droit de grève. Désorienté, à bout de nerfs, le père s'abandonne à une soif de vengeance désespérée. Dans une bouffée d'optimisme naïf, il envisage avec une moue satisfaite les pires horreurs. On jugera peut-être que c'est démesuré, trop excessif. Et pourtant... Trop influencé sans doute par le conte « Le petit Poucet » (1697) de Charles Perrault, le père ne trouve pas d'autre solution à son stress auditif que celle-ci : se séparer, se défaire de l'enfant, une bonne fois pour toutes. S'en débarrasser comme un chien qu'on abandonne au bord de la route. Le laisser mourir de faim, seul au milieu d'un bois : « Et tu proposes quoi ? // On pourrait le perdre // Ah ouais ? Comment tu vois ça ? // Une balade en forêt et hop ». Cruelle impasse, à moins d'être sourd... Il y a de quoi faire hurler à la mort l'illustre rejeton, du genre blanc-bec plutôt grognon. Le marmot passe son temps à s'égosiller à pleins poumons, il hurle sans discontinuer, à se casser la voix :  « il gueule tellement qu'on le retrouvera tout de suite », répond in petto la mère. Même pas besoin des bottes de sept lieues. A noter que l'un et l'autre n'envisagent pas les sanctions pénales prévues par la loi. Le mari, animé par un sentiment d'urgence, s'efforçait de tirer son épingle du jeu. La fin du tunnel semblait apparaître, mais non... La réplique de la mère, restée sceptique, va mettre un sérieux coup de frein aux impulsions infanticides de son époux... Pragmatique, le mari va envisager une autre forme d'éloignement de son petit monstre : « il pourrait faire une fugue », lance-t-il sans barguigner à son épouse. Cette dernière, avec un sourire complice, trouve un prétexte ingénieux pour dissimuler la vraie cause de cette fugue: « Retrouver une copine de vacances ? ». Son mari trouve le motif judicieux : « Pourquoi pas ? ». Mais c'est oublier  l'humeur batailleuse et l'instinct belliqueux de ce marmot capricieux et trop gâté. Un vrai dragon ce sale môme qui piaille à tout bout de champ et donne des coups de pied dans tout ce qui bouge ! Ce que laisse entendre par un euphémisme savoureux sa génitrice : « Il tape ses copines de vacances ». Il faut le reconnaître, ce projet d'éviction du bambin ne sucite pas l'enthousiasme ni l'adhésion de la mère. Suggestion trop farfelue. L'option est radicalement rejetée. Il ne sera pas facile de pousser l'enfant dehors. Nouvel échec, donc. La  tension monte encore d'un cran. Dans le même temps, le public ne doute guère de ce qu'il adviendra : une perpétuité du supplice ! Toute ressemblance avec une situation ayant existé n'est pas purement fortuite ici. Après un temps de repos signalé par une indication de mise en scène (Un temps), les parents s'avouent mutuellement leur exaspération. Le père reconnait sa difficulté à stabiliser ses émotions : « Tu sais quoi ? J'en peux plus ». Il renonce à ses funestes projets. La lassitude l'emporte, mais pas tout à fait. Le voilà qui se met à rêver. Prêt à jouer, non plus le rôle de l'ogre qui mange les petits enfants, du croque-mitaine, mais celui de Casanova. Dormir ensemble ! Voilà de quoi réveiller le désir érotique ! Mais non. Même pas. Ils savent tous les deux que ce n'est plus le cas depuis belle lurette.
 
[phrase de liaison qui annonce la seconde sous-partie]
 
 
B. L'inversion des mécanismes de domination, des choix parentaux désastreux : le laisser-faire absolu.
 
            Si l'on y regarde bien, le même motif revient sans cesse, la scène de ménage. Difficile de broder sur ce canevas, et pourtant l'auteur y parvient avec brio. Le thème de l'amour joue un rôle important dans l'infléchissement du destin des deux personnages. La vie conjugale devient un lieu de combat. Le dramaturge nous ouvre les portes de leur intimité. Ce qui frappe en tout premier lieu dans ce portrait des parents décontenancés, c'est leur fragilité psychique. Lentement mais sûrement, le public est amené à vivre cette asphyxie du couple, en suivant pas à pas ses mésaventures. Rémi De Vos exploite les formidables contradictions de nos deux protagonistes soumis aux diktats de leur môme. L'enfant est privé de voix du début à la fin de la pièce. Tout juste entend-on le crépitement du poste de télévision dans le salon. Dans ce mélodrame familial, jamais on ne s'éloigne de ce même sujet : le martyre quotidien enduré par cette femme et cet homme. Ces deux tourtereaux sont attendrissants, après tout. On les imaginerait tous les deux, blottis l'un contre l'autre sur une banquette ou sous une couette. Mais non, l'enfant occupe le canapé du salon et regarde des dessins animés. L'enfant grignote tout, pas seulement les chips. A commencer par l'emploi du temps de ses parents. Tout tourne autour de lui. Cette  maison qui sent le bon pain grillé au matin, c'est son quartier général, sa tour de contrôle. Tout la question est là et tout l'enjeu de la pièce aussi. Le sketche porte un éclairage saisissant sur cet esclavage parental où se mêlent les frustrations écornées par une existence sans relief et des regrets sentimentaux. Ce qui pourrait sembler caricatural ne l'est pas. La sexualité est également polémique. Rien de flamboyant de ce  côté-là. Et c'est au fond la question clé. Car la nuit venue, la chambre pour deux devient une chambre pour trois. Alors, nos jeunes amoureux ne se battent plus. Ils démissionnent, ils jettent l'éponge. Mais on ne peut passer sa vie à fuir. Parvenus à ce point de non retour, ils envisagent un mode de partage de la présence parentale (L'HOMME.  « Faudrait envisager une garde alternée »). La formule de la résidence alternée, un mode de garde à l'amiable, n'est pas si différent que celui qu'ils ont adopté (LA FEMME. « C'est déjà un peu ça non ? »). Les rotations des tours de garde font débat (L'HOMME.  « Le prendre chacun son tour »). La mère, ravie d'avoir gain de cause mais toujours soupçonneuse, interroge son concubin : « Tu veux dire quoi ? À tour de rôle ? ». Celui-ci, adoptant un profil bas, lui rétorque : « Je le prendrai un week-end sur deux ». Son épouse se pose en victime et lui fait ressentir un rapport de force. Elle maintient la pression et lance un ultimatum : « Aussi pendant les vacances ». Le mari, qui a la bouche sèche, ne se rend pas à cette première sommation et riposte, la gorge nouée : « Pas toutes les vacances ». Ne retenant même pas l'idée d'une alternance à durée égale de cette garde de l'enfant, elle  répète l'ultimatum : « Ah ben si ». Elle a pris le pouvoir, elle aussi.  Elle ne se retient plus. On notera que la faute est toujours renvoyée sur le père, qui n'est jamais à la hauteur, qui ne soutient pas son épouse dans sa fonction parentale. Et qui donc... ne sert à rien. Autant dire qu'il incarne la décadence de la fonction paternelle. Visiblement, cela, il l'a compris. La didascalie qui suit indique un laps de temps où les belligérants s'observent, comme deux ronds de flan (Il la regarde). Tout  laisse à penser que le divorce est imminent : « Ça veut dire qu'on se sépare ? ». Mais là encore, les deux partenaires n'agissent pas à l'unisson. C'est ce moment critique que cherche à restituer Rémi De Vos avec ce couple qui cherche à maîtriser la situation, mais qui finalement se perd.
 
II. Le jeu théâtral : une mécanique scénaristique bien huilée de bout en bout ...
 
A. L'écriture à la recherche de la justesse dans les dialogues : des paroles anodines, oiseuses, des bouts de pensée à la queue leu leu...
 
       La mise en scène, de nature cumulative, ne fait rien avancer du tout.
       Elle fige les personnages dans une situation d'enlisement. D'où ce style direct et dépouillé, cette écriture incisive qui répercute la trivialité du réel. Par ailleurs, les didascalies ou notes de mise en scène sont peu nombreuses. Tout se passe comme si l'auteur s'interdisait les sauts à la ligne pour mieux se concentrer sur les répliques de chacun des deux rôles, sur les annonces un peu présomptueuses du mari. Les paroles articulées se succèdent, comme des apartés pince-sans-rire en direction du public, entre deux respirations coupées, donnant l'impression d'un carambolage de mots qui fâchent. Des bribes de phrases émaillent à petites foulées ces dialogues au cordeau. A tel point qu'on croit avoir affaire à un discours creux, de ceux qui brassent de l'air. Pour mieux nous faire ressentir, peut-être, que l'histoire de ce couple se serait brusquement accélérée. Les réactions  des personnages ne versent pas dans le tragique, la note d'humour est toujours là pour détendre  l'atmosphère. Le suspense est savamment ménagé et tient le spectateur en haleine jusqu'au dénouement. Ce qu'on appelle en théâtrologie une gradation ascendante. Ce crescendo aboutit à une acmé, à un apogée pathétique (le point culminant du mélodrame, de l'intensité dramatique, ou climax). De brèves incises, des phrases courtes, balisées parfois par des locutions interjectives  marquant la déception ou l'hésitation,  déclenchent un véritable jaillissement du désespoir (LA FEMME.  Qu'est-ce que tu veux que je te dise? L'HOMME.  Si tu trouves ça normal. LA FEMME.  On se sépare alors  ? [...] LA FEMME. Ça me fait quelque chose... L'HOMME.  Ah bon? LA FEMME.  Ben quand même. L'HOMME. Tu m'aimes ? LA FEMME.  Ben). Sans parler de cette cascade d'apostrophes (comme « oh », « ah bon »), d'adverbes exprimant l'acceptation (« oui », « ben oui ») ou bien la récusation (« non », « non plus », ou d'onomatopées essoufflées (« et hop », « ah ben », « hein »). A certains moments, tous ces mots exprimant une vive émotion (modalisateurs de l'énoncé) pleuvent à verse : « LA FEMME.  Quoi oui oh ben alors d'accord ? L'HOMME.  Quoi quoi oui oh ben alors d'accord?  D'accord quoi? Quoi d'accord ?  Quoi oui oh ben alors d'accord d'accord ? ». Au point de virer comme une toupie. Un embouteillage d'accidents linguistiques... Tout cela a l'air bien plat au premier abord, dans le ton de la comédie de m½urs un peu fadasse. Mais en réalité, tout s'enchaîne très vite dans ce jeu de répliques qui claquent comme les voiles des moulins à vent. D'un autre côté, toutes les paroles échangées, sont soumises à la réalité des faits. C'est là que réside toute la force du travail d'écriture, toujours en pointillé, de Rémi De Vos... Une écriture subtilement architecturée où manquent les soudures, les composants de la phrase, comme dans les jeux de meccano. Le texte regorge de ces palabres mâchonnées sans fin, de syllabes ânonnées après-coup, de mots parfois crus, de dérobades renfrognées, de roucoulades vite ravalées qui entraînent le couple dans un flot rocambolesque de reproches.  Bien que ludique par le ton, le phrasé devient plus haché à la fin du texte : L'HOMME.   T'es triste ? LA FEMME.  Non c'est L'HOMME.  Je propose des trucs LA FEMME.  Tu m'aimes ? L'HOMME.  C'est pas la question LA FEMME.  Non ».
 
B. Une comédie grinçante aux allures de clip humoristique, avec le rire aux abois...
 
        C'est le rire à gorge déployée qui permet la représentation de ce qui serait impossible d'imaginer. L'abandon d'un enfant est socialement et moralement inacceptable. L'auteur n'y va pas avec le dos de la cuiller, non plus par quatre chemins. Le théâtre rend ces choses-là possibles. C'est à peine si l'on croit, un seul moment, à une parodie, à une farce grotesque. On a vraiment l'impression que les mots ne parlent qu'à nous seuls. Rémi De Vos ne fait pas dans l'aquarelle, il saisit au vol les réactions de chacun, en restant au plus proche des routines de la vie quotidienne. Il aborde un sujet dérangeant, qui fait partie de la loterie de la vie : l'enfant gâté, surprotégé par une mère trop possessive, trop permissive, qui devient un bourreau domestique... Difficile de trouver des notes de gaieté dans la débâcle de ce couple qui cherche à se dépêtrer comme il peut de cet esclavage de l'habitude. De mauvaises habitudes, faudrait-il ajouter. Le couple a pâti du pouvoir tyrannique de leur enfant  se conduisant en despote. On se dit alors qu'il suffirait de trouver le juste milieu, pour dénouer ce face-à-face insupportable. Bien sûr, il en faut des gestes tendres, des baisers et des câlins pour continuer à avancer. Pour dissocier la vie intime et le rôle de parent. Mais non, la discussion s'embourbe... Un humour doux-amer éclaire un peu la noirceur du scénario, celui d'un mioche braillard  qui a le droit de faire tout ce qu'il veut. Celui d'une autocratie où l'enfant décide de tout. On devine ces tendances autocratiques dans le passage où le couple marié envisage d'aller à l'hôtel, presqu'en cachette, pour avoir des rapports amoureux. Une liaison adultère, en quelque sorte. Un réflexe de survie pour ces deux amants qui refusent de faire l'impasse sur leur vie sentimentale, sur leur vie sexuelle, toutes deux aussi chaotiques l'une que l'autre. Mais dans ce cercle familial, il n'y a pas de place pour le conjoint, même si c'est un jeune tendron. L'enfant forme un couple avec sa mère, qui incarne une maternité exclusive. Les rêves de romance aux parfums d'exotisme refont surface. Mais l'extase tarde à venir... Ce qui fonde le comique dans ce petit intermède, c'est que toutes les pistes avancées dans ce plan de comédie s'annulent. Il n'y a pas de porte de sortie, tant les attendus de ce scénario paraissent bien connus. Pas moyen de se tirer de cette situation périlleuse, et ceci jusqu'à la débandade finale dont on ne se relève pas... L'auteur nous tend un miroir des réalités quotidiennes que nous connaissons si bien. Ou pas encore. Le public en connaît un rayon dans ce ce domaine et s'en amuse. A l'issue de leur tête-à-tête, où ni l'un ni l'autre ne mâcheront leurs mots,  l'épilogue se termine sur une note amusante. La mère de l'enfant, qu'on savait bêcheuse, mais un peu casse-cou tout de même, temporise et fait entendre une sentence qui exclut toute discussion : « C'est lui qui décide ». Comprenons que c'est le mioche qui décide qui fera ses valises... D'une certaine façon, la mère de famille confesse à son mari sa vénération de l'enfant roi. Sa tendance exaspérante à passer tous les caprices de son gamin s'exacerbe et met en échec la bonne volonté de son époux. A bien réfléchir, cette femme est incapable de se prendre en charge, d'assumer ses responsabilités Cette immaturité affective rappelle celle d'un enfant de cinq ans. Mais pas plus. Le mot de la fin risque de faire du futur quelque chose de sombre, d'inquiétant. Ni vaudeville ni tragédie, la pièce s'arrête, nous laissant tout loisir d'imaginer les nuits qui attendent ces deux êtres qui n'ont plus rien à se dire. L'enfant roi viendra combler un vide dans la vie amoureuse de cette femme. Des nuits d'insomnie et de solitude ne feront pas oublier à l'homme divorcé la morne grisaille du célibat. Ce qui est suggéré par la dernière didascalie : « Noir ». Autrement dit, le rideau tombe. Avec le bruit sec d'une lettre de rupture tombant au fond d'une boîte aux lettres.
 
Conclusion
 
        Dans cette partition à deux voix, cette pavane pour un couple presque défunt déjà, Rémi De Vos se fait le porte-parole du temps en fuite, des vies manquées, gâchées, des illusions perdues. Les dialogues par onomatopées, relancés à tours de bras, sont assénés comme un atout sur une table de belote, enfonçant des portes ouvertes à coups de poing. Les deux personnages s'enferment l'un et l'autre dans un monologue solitaire.
 
         A chacun sa vérité, semble nous dire l'auteur. Ce qui peut nous rappeler l'argument d'une célèbre pièce de Pirandello. Mais là encore cette observation est laissée aux bons soins du public... Ceci dit, dans cette pièce du répertoire contemporain, le dramaturge rend compte d'une manière attachante d'une rupture, dont on savoure le réalisme cru et la vérité émotionnelle. La pièce reste une contribution passionnante au décryptage de la vie de couple. D'une vie ratée, certes. Mais Rémi De Vos aime tant les ratés ! Et il y va à la truelle dans ses pièces !
     Ce spectacle très tenu ne peut que raviver l'engouement du public pour le théâtre, pour le spectacle vivant, sans jamais rester sur sa faim.                                               Bernard Mirgain
 
Notes : moralité du conte de Perrault, « Le Petit Poucet »

On ne s'afflige point d'avoir beaucoup d'enfans
Quand ils sont tous beaux, bien-faits & bien grands
Et d'un extérieur qui brille ;
Mais si l'un d'eux est foible ou ne dit mot,
On le méprise, on le l'aille, on le pille.
Quelquefois, cependant, c'est ce petit marmot
Qui fera le bonheur de toute la famille.
MARION AUBERT. REMI DE VOS. THEÂTRE.
                        Lançon Auguste : "Morts en ligne"

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#Posté le samedi 08 décembre 2018 06:47

Modifié le samedi 08 décembre 2018 08:16

Texte à trous.

                  La catachrèse comme ornement de style...
                          et caricature d'un sens possible.

Tout le monde se souvient de l'effet déstabilisant de cette figure de style dans les vers de Rimbaud (« C'est un trou de verdure où chante une rivière » // Il a deux trous rouges au côté droit ») qui encadrent le sonnet intitulé « Le dormeur du val ».

Il est proposé ici de rédiger un « texte plaisir » en suivant l'exemple du chanteur Henri Courseaux qui emploie dans sa chanson de simples phrases, mais dotées d'un caractère hardi et poétique, voire philosophique (« La surface est un trou qui ment »). On attend une anecdote croustillante, une formule raffinée ou une sentence, flirtant entre l'inattendu, l'absurde et la poésie. On expérimente une recette pour fabriquer cette phrase qui consiste à confronter les emplois  du mot « trou », à faire étalage de ses dénominations multiples, de ses nuances infinies, à les faire ricocher en jouant sur la syllepse de sens.

L'architecture du propos, bâtie à l'échelle d'une seule phrase, doit faire apparaître dans deux propositions (coordonnées ou subordonnées) le terme, au singulier ou au pluriel. Le mot « trou » doit balloter comme le bouchon d'une ligne de pêche d'une proposition à l'autre.  La solidité de l'enchaînement phrastique est assurée par une clef de voûte incarnée par ce mot à la polysémie hors norme. Dans les interstices de cette phrase doit se profiler la silhouette de cette figure de style plus vive que jamais en bouche.

La catachrèse se fonde sur un rapprochement abusif, un rapport d'analogie entre un sens premier (sens littéral, sens strict et concret d'une réalité donnée) et un sens secondaire, imagé (par extension, par détournement ou glissement de sens qui assortissent le terme d'une idée nouvelle).

Il s'agit de se mettre à pied d'½uvre pour dénicher les trous investis d'un sens singulier. Pour prélever ensuite un échantillon de ces sens possibles afin d'imaginer le schéma organisationnel d'une seule phrase, en prose, tournant en orbite autour de la catachrèse. Une phrase en un seul tenant qui creuse le thème choisi, entortillé à cette figure de rhétorique. Un exercice de haute voltige dont le but consiste à attirer l'attention de l'éventuel lecteur sur la polysémie des mots (par une convergence ou une divergence, une synonymie ou une antinomie absolue).

Le critère de réussite de l'exercice proposé repose sur la surprise et l'originalité qui subliment l'expérience des mots dans ce compagnonnage avec la catachrèse. Sur une cocasserie qui pourrait distiller aussi une certaine sagesse philosophique...
Texte à trous.

Phrases inventées par les élèves :

Le besoin est un trou qui ne se comble qu'avec d'autres trous.
Les trous noirs sont trou-blancs...
J'ai bu comme un trou pendant une heure de trou.
Le trou normand, ce déboucheur de trou !
Pour te rejoindre dans ce glacial trou noir, je trace inexorablement ma route : ce trou que tu as laissé jamais ne sera comblé.
Trou ou pas trou, telle est la question.
Cet exercice consiste à remplir deux trous, mais c'est difficile lorsqu'on n'a pas les yeux en face des trous.
Le trou de l'amour troue mon c½ur d'une bulle ensanglantée.
Mes trous de mémoire m'empêchent de remplir ce texte à trous.
Le trou de la sécu fait des trous dans nos poches.
C'est en picolant come un trou que l'esprit est troublé.
Je suis seule dans mon trou, donc je cherche des bouche-trous.
Je suis au fond du trou et je vis dans un trou perdu.

Pour en savoir plus sur la catachrèse :

https://bmirgain.skyrock.com/2166473347-LE-DETOURNEMENT-CATACHRESTIQUE.html

https://bmirgain.skyrock.com/2138043447-DEFINITION-DE-LA-CATACHRESE-ETUDE-DES-TROPES.html

https://bmirgain.skyrock.com/3170238387-La-catachrese-Une-caricature-des-choses.html

Pour jeter un regard sur d'autres études à propos de figures de style :

LA METAPHORE

https://bmirgain.skyrock.com/3294068108-APPELONS-UN-CHAT-UN-CHAT-ETUDE-DE-LA-METAPHORE.html

LA PARONOMASE

https://bmirgain.skyrock.com/3271946978-POUR-UNE-POETIQUE-DE-LA-PARONOMASE.html

L'ANTONOMASE

https://bmirgain.skyrock.com/3272739472-L-ANTONOMASE-A-LA-DEROBADE.html

LES HYPOSTASES
https://bmirgain.skyrock.com/3294068022-HYPOSTASES-LE-PARTICIPE-PASSE-SUSBTANTIVE-AVEC-COMPLEMENTATION.html
 
https://bmirgain.skyrock.com/3286248934-SUBSTANTIVATION-DES-PARTICIPES-PASSES-ET-VOCABULAIRE-DE-LA-GASTRONOMIE.html

L'ETYMOLOGIE

https://bmirgain.skyrock.com/2660447282-FAUSSES-ETYMOLOGIES-VRAIES-MYTHOLOGIES.html

LA CLASSIFICATION DES FIGURES
https://bmirgain.skyrock.com/3247880588-FIGURES-DE-STYLE-TABLEAU-DES-PRINCIPAUX-PROCEDES-DE-STYLE.html
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#Posté le samedi 08 décembre 2018 08:18

Modifié le mardi 25 décembre 2018 11:30

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