THEATRE D'EPINAL
Historique : Le théâtre municipal d'Epinal a été construit, en 1806 d'après les plans de l'architecte nancéen Grillot (architecte du palais de justice d'Epinal) en collaboration avec le citoyen Navière, ingénieur ordinaire des Ponts et chaussées. Il se situe au numéro 1 de la rue François Bladez, en face de la rue de la Comédie, au centre ville d'Epinal.
Le Théâtre municipal d'Epinal a été construit en 1806, à l'emplacement de la Grange aux dîmes des Dames du Chapitre (abbaye bénédictine). Ce bâtiment classique n'est pas classé aux Monuments historiques. Ce théâtre surnommé « la bonbonnière » est de style baroque rococo dit « à l'italienne » (parce qu'il empile du parterre au plafond, galeries, étages et balcons). Il dispose d'une jauge de 330 personnes environ. Par analogie, la bonbonnière (petite boîte à bonbons joliment décorée) a donné son nom à toute construction d'un style précieusement travaillé et luxueusement aménagée. Le parterre se compose de 151 fauteuils d'orchestre, la première galerie de 64 places, la deuxième de 78 places. Au troisième étage, se trouve le poulailler.
La scène mesure 12 mètres sur 12, ce qui représente une surface de 144 m2. Les décors peints datent de 1905. Les qualités acoustiques de ce théâtre à l'italienne sont tout à fait exceptionnelles. La Régie Générale du Théâtre d'Epinal compte 10 salariés, des intermittents du spectacle chargés de l'éclairage, du son, des installations techniques. Contrairement à d'autres édifices de la région (Lunéville, Verdun, Mirecourt), le théâtre d'Epinal est le seul à avoir été conservé dans l'état.
Les loges se situant de chaque côté de la scène (du proscenium) étaient réservées aux enfants. Le public était masqué. Les premiers balcons étaient réservés aux riches familles, les proches de la famille (le cercle des pouvoirs) se répartissant dans le deuxième balcon. Chaque loge aux balcons est équipée d'une porte à double-battants. Sous l'Ancien Régime, des domestiques ouvraient et refermaient ces portes après l'arrivée des spectateurs (d'où le terme « ouvreuse », encore utilisé parfois au théâtre ou au cinéma). Plus haut, se trouvent les galeries du poulailler ou paradis. Cette galerie supérieure, très éloignée de la scène, permettait aux étudiants ou aux amateurs de théâtre désargentés d'obtenir des places à un prix dérisoire. Le « paradis » désigne donc ce dernier étage, mais donne aussi son nom au public qui occupe cette galerie. Sans doute pour rappeler à ces bonnes âmes le Sermon sur la montagne rapporté au début de l'Evangile de Matthieu : « beati pauperes quoniam ipsorum est regnum caelorum » (Bienheureux les pauvres parce que le royaume des cieux leur appartient » - Matth, V,3). Les étudiants et autres carabins perchés là-haut se montraient plutôt turbulents et ne manquaient jamais, lorsque la pièce leur déplaisait, de jeter à toute volée toutes sortes de détritus végétaux sur les acteurs, à la manière de ceux qui nourrissent leurs volailles dans le poulailler...
La rosace du plafond central témoigne de la présence autrefois d'un immense lustre à bougies autrefois destiné à l'éclairage de la salle...Une rangée de bougies servait à éclairer le devant de la scène (les « feux » de la rampe à l'origine de l'expression « être sous les feux de la rampe »). De part et d'autre des baignoires (on appelait ainsi les loges de rez-de-chaussée, qui présentaient une partie saillante et arrondie au bord de la fosse d'orchestre, juste au-dessous du premier balcon ; on disait « louer une baignoire », « prendre une baignoire »), trouvent place aujourd'hui les projecteurs ou « gamelles ». Ceux qui manoeuvrent ces projecteurs s'appellent des « poursuiteurs ». Les baignoires sont équipées de rideaux qui servent à dissimuler la présence des techniciens et des assistants. A l'époque classique, les spectateurs du parterre se tenaient debout. Un héritage sans doute du théâtre de rue, du théâtre de tréteaux. On a installé par la suite les fauteuils d'orchestre, qui tirent leur nom des chaises destinées aux musiciens de l'orchestre qui accompagnait les mises en scène (pièces de Molière notamment).
Le plateau du théâtre d'Epinal est en pente. Dans le jargon théâtral, on distingue le côté cour (à droite, à partir du parterre), et le côté jardin (à gauche), la « face » et le « lointain ». Le cadre de scène (la boîte magique) est constitué d'un rideau de fer (rarement actionné), d'un tablier rouge, le manteau d'Arlequin, et de la frise de forêt. Ce triangle sert comme élément de base de la scénographie. Au-dessus du manteau d'Arlequin, on aperçoit une figure féminine, un visage nu (la déesse Melpomène ou bien l'acteur qui attend pour jouer son personnage, prêt à accepter de jouer tel ou tel rôle ?), portant dans chaque main deux masques : le premier rit (la comédie), le second pleure (la tragédie). « Castigat ridendo, mores », c'est la phrase latine brodée sur le rideau. Elle permet de comprendre la visée pédagogique du rire. L'ensemble de la structure, de la pente au poulailler, ressemble à une cale de bateau, mais à l'envers. C'est pourquoi le jargon technique des gens du théâtre se rapproche beaucoup du vocabulaire de la marine.
LES COULISSES
Les projecteurs sont accrochés aux cintres, aux perches, situés juste au-dessus du plateau. Le support articulé en forme de potence qui sert à porter un microphone tendu vers les acteurs par un assistant du son s'appelle une « girafe » (on dit aussi une « jenny »). On « patche » les projecteurs pour un « plan de feu », par exemple. On pointe les projecteurs ou gamelles à la main, avec une échelle. Le technicien peut réaliser un éclairage « douche », « latéral », « de face » ou « rasant » (à partir des baignoires, de part et d'autre du proscenium). On descend, on arme, on monte une perche, dit-on souvent. Sur le plancher du plateau nu, on distingue nettement des rails qu'on appelle des costières. En fait, le décor était monté et déplacé sur des rails. Le plancher d'une scène de théâtre peut disposer de deux types de costières : les rainures métalliques permettant de faire glisser les décors ou les trappes (scène du Théâtre du Peuple à Bussang). La trappe est en général un emplacement carré, rond, ou ovale, qui est pratiqué dans le plancher et qui peut s'ouvrir et se fermer, manuellement ou mécaniquement, afin de permettre des apparitions ou des disparitions soudaines de personnages. Il n'y a pas de trappes dans le théâtre d'Epinal. Le mot « costières » provient peut-être de la marine : on utilise en bord de mer des rails pour mettre à sec les cales des voiliers...
Du plafond, domine le gril, avec ses passerelles, ses perches et ses cintres. Au théâtre, on appelle cintre la partie supérieure de la cage de scène où l'on remonte les décors. Les loges se trouvant au niveau de cette cage s'appellent les « loges de cintre ». Le « cintre », par extension, désigne aussi l'ensemble des spectateurs qui se trouvent à cette même hauteur. Les perches permettaient d'actionner toutes sortes de pendillons, grâce à des cordages, qu'on appelle « drisses » ou « guindes ».
Une superstition veut qu'au théâtre, comme dans la marine, on ne prononce jamais le mot « corde ». Cela peut porter malheur. De nombreux marins se suicidaient par pendaison. Ces cordages sont fixés à des poutres grâce à des « sauterelles ». La sauterelle, dans la langue technique, se rapporte au dispositif de fixation permettant un blocage rapide des cordages ou des ficelles. On fixe ainsi un bât-flanc ou une barre, à l'aide d'un crochet et d'un anneau qui coulisse le long de la corde d'attache. L'origine du mot est incertaine : non, les comédiens n'avaient pas « une sauterelle dans le plafond ». Il est probable que l'explication soit à chercher du côté des membres articulés de l'insecte. Une sauterelle désigne aussi, par analogie avec les prouesses de l'insecte, une femme de petite vertu, une cocotte du trottoir parisien. La gigantesque poulie à engrenage dissimulée derrière la frise de forêt, servait à actionner le mécanisme servant à faire descendre ou monter le lustre qui était très lourd. Il s'agissait d'un appareil d'éclairage à la bougie à plusieurs branches. Les bougies Paris ou chandelles devaient être mouchées à chaque acte. On coupait le bout de la mèche consumée qui empêchait la chandelle d'éclairer (moucher une chandelle).
Document rédigé en collaboration avec M. Christian Germain, avec nos remerciements reconnaissants...
A lire : « Histoire du théâtre dessinée » d'André Degaine – Editions Nizet
« Qu'est-ce que le théâtre » Christian Biet - Christophe Triau – Collection Folio-Essais
LIENS INTERNET :
LES AMIS DU THEATRE POPULAIRE - ATP - Centre Culturel - 4 rue Claude Gellée - 88 000 EPINAL - 03 29 82 00 25
E mail : atp.vosges@wanadoo.fr
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