La chauve-souris.
Paroles et musique de Thomas Fersen. 1999.
Une chauve-souris
Aimait un parapluie, Un grand parapluie noir
Découpé dans la nuit,
Par goût de désespoir
Car tout glissait sur lui,
Une chauve-souris
Aimait un parapluie (bis).
Aimait un parapluie, Un grand parapluie noir
Découpé dans la nuit,
Par goût de désespoir
Car tout glissait sur lui,
Une chauve-souris
Aimait un parapluie (bis).
Elle marchait au radar,
Le sommeil l'avait fuie,
Elle voulait s'mettre à boire,
Se jeter au fond d'un puits.
Une chauve-souris
Aimait un parapluie,
Un grand parapluie noir
Découpé dans la nuit (bis).
Le sommeil l'avait fuie,
Elle voulait s'mettre à boire,
Se jeter au fond d'un puits.
Une chauve-souris
Aimait un parapluie,
Un grand parapluie noir
Découpé dans la nuit (bis).
Sans jamais s'émouvoir
Pour cette chauve-souris,
Le grand parapluie noir
Sortait de son étui.
Il prenait sous son aile
Soin d'une belle de nuit
Qui, boulevard Saint-Marcel,
Le nourrissait de pluie.
Pour cette chauve-souris,
Le grand parapluie noir
Sortait de son étui.
Il prenait sous son aile
Soin d'une belle de nuit
Qui, boulevard Saint-Marcel,
Le nourrissait de pluie.
Puis le grand accessoire
Se mit à voyager
Dans son bel habit noir,
Son habit noir de jais.
Après les palabres,
Pour faire un peu d'osier,
Un avaleur de sabres
Le mit dans son gosier (bis).
Se mit à voyager
Dans son bel habit noir,
Son habit noir de jais.
Après les palabres,
Pour faire un peu d'osier,
Un avaleur de sabres
Le mit dans son gosier (bis).
A un acrobate,
Servit de balancier,
Un vendeur de cravates
Le prit comme associé,
Puis il se déplia
Sur une permanente,
Puis il se déplia
Car il pleuvait sur Nantes (bis).
Servit de balancier,
Un vendeur de cravates
Le prit comme associé,
Puis il se déplia
Sur une permanente,
Puis il se déplia
Car il pleuvait sur Nantes (bis).
Une chauve-souris
Demoiselle de la nuit,
Une chauve-souris,
Aimait un parapluie.
Elle vint chercher l'oubli
Au fond d'un vieux manoir
Où elle mourrait d'ennui
Pendant que le parapluie
Menait au Père-Lachaise
Une vie de bâton d'chaise.
Demoiselle de la nuit,
Une chauve-souris,
Aimait un parapluie.
Elle vint chercher l'oubli
Au fond d'un vieux manoir
Où elle mourrait d'ennui
Pendant que le parapluie
Menait au Père-Lachaise
Une vie de bâton d'chaise.
Un jour de mauvais temps,
Un jour de mauvais temps,
Un brusque coup de vent
lui mit les pieds devant.
On le laissa pour mort
Dans quelque caniveau,
On le laissa pour mort
Avec le bec dans l'eau (bis).
Un jour de mauvais temps,
Un brusque coup de vent
lui mit les pieds devant.
On le laissa pour mort
Dans quelque caniveau,
On le laissa pour mort
Avec le bec dans l'eau (bis).
En voyant son squelette
Qui faisait sa toilette
Parmi les détritus
Et les denrées foutues,
"C'est la chance qui m'sourit !"
Hurla la chauve-souris,
"Je le croyais perdu,
Le manche est revenu (bis)".
Qui faisait sa toilette
Parmi les détritus
Et les denrées foutues,
"C'est la chance qui m'sourit !"
Hurla la chauve-souris,
"Je le croyais perdu,
Le manche est revenu (bis)".
Riant comme une baleine
Pleurant comme une madeleine,
Une chauve-souris
Aimait un parapluie.
Ils allèrent se dire oui
Dans l'grenier d'la mairie,
Une chauve-souris
Aimait un parapluie (bis).
Pleurant comme une madeleine,
Une chauve-souris
Aimait un parapluie.
Ils allèrent se dire oui
Dans l'grenier d'la mairie,
Une chauve-souris
Aimait un parapluie (bis).
Thomas Fersen; né en 1963 à Paris, est un auteur, compositeur et interprète, qui joue avec les mots pour faire le récit d'une improbable histoire d'amour entre une chauve-souris et un parapluie... Une musique endiablée, ensorcelante, aux accents klezmer, tzigane ou yiddish, teintée d'influences du swing-jazz manouche d'un Django Reinhardt. Sans oublier le feeling vocal assez rocailleux du chanteur, une voix éraillée qui donne une puissance insoupçonnée à sa musique et à ses textes ludiques. Avec en prime un rythme de czardas slave qui balance au son du ukulélé hawaïen, de la mandoline russe et du bayan... Une partie instrumentale, festive, des paroles anti-conformistes qui ont un petit côté canaille, façon Dutronc, Bobby Lapointe, Jacques Higelin ou Serge Gainsbourg, voilà le résumé de ce titre « La chauve-souris » qui fait partie de l'album Qu4tre sorti en 1999...
Une histoire proche de l'univers des contes merveilleux, ceux de Perrault (« Cendrillon ou la Petite Pantoufle de Verre » en 1696) ou des frères Grimm (« Contes de l'enfance et du foyer » - « Kinder und Hausmärchen » en1819), qui nous rapproche aussi du bestiaire des fabulistes. La Fontaine nous a habitués dans ses fables à d'insolites rencontres et à des couples improbables : le renard et le bouc, ou les raisins, le lion et le moucheron, la cigale et la fourmi...
Thomas Fersen met en scène un couple bien plus improbable ! Que nous raconte sa chanson ? C'est une histoire déglinguée, celle d'une passion interdite, d'un coup de foudre immédiat, d'amours impossibles, de rêves contrariés comme des papiers froissés. A trop broyer du noir, le c½ur d'une chauve-souris s'enflamme pour un parapluie : elle rêve d'en faire son époux et pourquoi pas, d'avaler le pépin.
Bravant les intempéries sur un chemin semé d'embûches, cette chauve-souris rêve comme une midinette (mais du genre têtue dans les situations désespérées) : elle se sent pousser des ailes et s'entiche d'un riflard, qui va connaître d'ailleurs bien des pépins ! Un projet complètement fou pour ce chéiroptère puisqu'il s'agit, rien de moins, que de trouver chaussure à son pied, autrement dit, de convoler à des noces funambulesques !
Le commentaire littéraire consiste à trouver et à analyser des centres d'intérêt dans un texte (ce qui est susceptible d'être intéressant, de retenir l'attention du lecteur). Une première partie de cette rédaction pourrait nous conduire à montrer que le chanteur-poète (qui affectionne les ambiances sombres et les averses urbaines propres au roman noir) glane des mots pour créer un monde flottant, étrange, saugrenu, ou bien jongle avec des images primesautières au gré de quelques délires épars, ramassés on ne sait où, pêle-mêle... Reste à savoir si ce récit à la fois grotesque et noir, qui déborde d'espièglerie et d'ingéniosité, signifie quelque chose ?
Tout récit suppose que l'on se creuse un peu la tête ! Dans une deuxième partie de sa rédaction, on pourra montrer que cette chanson est une farce tragi-comique, qui balance entre roman et humour noir, entre l'épopée héroïque et la comédie burlesque, où s'entremêlent les thèmes de l'amour, de l'attente, de la frustration, du rêve et de l'humiliation... Fersen brise avec un rire grinçant les poncifs du genre, toute fable animalière exigeant une morale. C'est la loi du genre ! Mais quelle leçon tirer de cette histoire sans queue ni tête et à dormir debout ?
Etude littéraire de la chanson de Thomas Fersen, par le professeur B.Mirgain
I. Des identités dépareillées, un enchaînement improbable de causes et d'effets.
A. Une histoire abracadabrante...
[phrase d'annonce de cette première partie, pour s'immerger dans la thématique de la chanson]
Les amoureux de la chanson ne peuvent que s'émerveiller devant un enchaînement assez improbable d'événements, ou plutôt, d'impromptus. Fersen pousse sa créativité jusqu'à proposer, avec une gouaille de cabaret, une composition fragmentée et mouvementée en abusant d'images détournées du sens habituel des mots. Il dit beaucoup, mais avec très peu, ou si peu... On voit défiler sous nos yeux enfantins un va-et-vient entre une chauve-souris et un objet somme toute banal, un parapluie. Drôle de couple ! *
Habituellement, la chauve-souris s'accroche aux cheveux ! Dans la chanson de Fersen, elle s'agrippe comme une pin-up écervelée aux basques d'un parapluie cafardeux. La silhouette carrossée de ce « grand parapluie noir, découpé dans la nuit » lui colle à la peau. Un ustensile bien membré, certes ; car taillé dans les matières raides, qu'on appelle baleines. Des montures permettant de tendre la toile cirée, qui, par analogie, suggèrent les courbes anatomiques des chauves-souris, avec leurs ailes membraneuses noir ténébreux. Bref, la carrure recherchée par notre mammifère n'est guère éloignée du profil standard d'un parapluie déployé. Après réflexion, le choix de la pipistrelle n'est pas si déconcertant qu'il ne paraît. Un parapluie qu'on dirait tout droit sorti du film musical Mary Poppins ! Le scénario presque hollywoodien de Fersen nous fait vivre le parti-pris d'une pécore prête à s'immoler aux voluptés de l'amour dans les bras de quelque flandrin en ciré imperméable. L'affaire est plutôt mal embarquée pour notre libellule noire ! Cette « demoiselle de la nuit » amoureuse, murée dans sa solitude comme certaine fille dans la fable de La Fontaine, personne ne saurait dire pourquoi elle a le béguin, tant cette passion amoureuse, tellement romanesque, semble peu sérieuse en quoi que ce soit (leitmotiv ou refrain de la chanson « une chauve-souris // aimait un parapluie »). Faut-il entendre par là, un peu trop facilement, qu'une chauve-souris n'a pas les pieds sur terre ? Quoi qu'il en soit, comme dans la fable de La Fontaine (« La Chauve-souris et les deux Belettes » - Livre II – fable V – 1668), la bestiole, cavernicole comme chacun sait, fonce « tête baissée » ! Un peu bigleuse (« Elle marchait au radar »), ou alors, comme on dit dans les cours de lycée, beurrée comme un petit Lu, cette petite bête se trompe sur la coupe tailleur d'un parapluie en tenue de cocktail... Qui sait ce qui se passe dans sa tête ? Mais pourquoi diable choisir un parapluie genre séducteur fêtard, à la drôle de dégaine, qui porte beau et malheureusement pour notre volatile, botte en touche. Il joue les jolis c½urs avec « une belle de nuit », et qui plus est, papillonne dans le « boulevard Saint-Marcel », quartier habituel du plaisir nocturne autour de la porte Saint-Martin (un quartier réservé aux activités prostitutionnelles depuis le règne de Saint-Louis, autrement dit Louis IX, roi de France de 1226 à 1270). Un pépin qui fait fi des intempéries, qui résiste aux avances de la chauve souris, mais pas à un malheureux coup de vent... Pas très glamour cette image du riflard qui sert d'étendoir à réclames (dans la troisième strophe, « Un vendeur de cravates // Le prit comme associé »). Précisons les choses. Vendeurs à la sauvette, marchands ambulants et autres fripiers, se servent de la carcasse retournée d'un parapluie rafistolé pour suspendre les fichus, mouchoirs de poche et cravates en soie qu'ils bradent dans les rues. Pour le dire en peu de mots, notre pébroc finit en parasol de marché ! Le parapluie accomplit par ailleurs des prouesses sur une piste de cirque: « Un avaleur de sabres // Le mit dans son gosier ». Va pour le sabre, ou l'aiguille à tricoter, ou des poissons rouges, mais tout de même, un parapluie, cela nous semble parfaitement irréaliste. Sauf à penser que Fersen, sensible au langage, fasse resurgir une vieille expression, bien connue de nos grands-mères, la locution populaire « avoir avalé le pépin », « un rude pépin » (pour dire « être enceinte », « en état de grossesse avancée »). Le chanteur facétieux joue avec le sens propre et le sens dérivé ou figuré des mots. Un parapluie est imperméable à l'eau, ne se laisse pas traverser par la pluie. C'est sa raison d'être. Au sens figuré, imperméable veut dire être fermé à tout sentiment. Par voie de conséquence, dans notre chansonnette, le pébroque est parfaitement insensible aux charmes de la petite bestiole (« Sans jamais s'émouvoir // Pour cette chauve-souris »), qui se prend une porte de grange en pleine figure ! De quoi décourager l'amoureuse la plus transie ! Elle y perdrait des plumes..., si elle en avait ! Ceci dit, un parapluie qui broie du noir, « découpé dans la nuit », ne peut faire que le désespoir des autres. Comment est-il décrit ? Un flandrin dans le genre « grand accessoire », s'encanaillant, qui porte beau dans « son bel habit noir », « son habit noir de jais », en jaquette smoking à queue de pie. Un faquin qui le fait à l'oseille aux petites souris (petit jeu de mots pour dire qu'il cherche à impressionner). Bref, il joue les jolis c½urs auprès des dames de petite vertu, du genre vamp irrésistible, sans doute cent fois plus belles que notre pipistrelle. La frimousse d'une roussette n'a rien d'excitant ! Ce parasol miniature se retrouve ensuite parmi les biffins, les crocheteurs : il sert de havresac à un chiffonnier des brocantes, à un portefaix (« Un vendeur de cravates »). On dira que ce parapluie a un caractère bien trempé ! Il se fait de l'osier (de l'argent) en accompagnant les petites souris de Pigalle. On lui soupçonne quelques toquades passagères (« Car tout glissait sur lui »). Le narrateur Thomas Fersen, un peu chafouin, relate les événements en surplomb, comme logé dans les nuages. Une comédie sentimentale qui tourne court, ou à vide, mettant en scène une chauve-souris un peu égarée et somnambule (« Elle marchait au radar,// Le sommeil l'avait fuie »). L'innocuité de l'animalcule est désarmante : forcément, cela attendrit le lecteur. L'attachement amoureux plane longtemps sur cette bluette. Cette petite bête se met en tête de redonner goût à la vie à ce parapluie aux airs de bateleur de foire (« Après les palabres »). Elle ne se rend compte de rien, elle n'a ni ranc½ur, ni rancune, juste son amour constant, indéfectible. C'est cette alliance des contraires, cette mésalliance qui séduit, avant tout, dans cette réinterprétation de Roméo et Juliette ou de Tristan et Iseult. Avouons-le, cette odyssée amoureuse est plus proche de la crétinerie sentimentale que du coup de foudre ! Bon, ceci dit, Gustave Flaubert en a fait le plus grand des romans : « Madame Bovary » (roman paru en 1857). Le personnage de Fersen se morfond à la campagne « Elle vint chercher l'oubli // Au fond d'un vieux manoir // Où elle mourrait d'ennui ». D'accord, Flaubert disait la même chose à propos d'Emma Bovary, mais dans un tout autre style : « Mais elle, sa vie était froide comme un grenier dont la lucarne est au nord, et l'ennui, araignée silencieuse, filait sa toile dans l'ombre, à tous les coins de son c½ur ». Le jeu des oppositions est manifeste dans la ritournelle de Fersen. La chauve-souris est prête à se jeter au fond d'un puits (comme Jef dans la chanson de Jacques Brel). Et puis, à l'opposé, nous avons un parapluie submergé de boulot, du genre « hardworking people » comme on dit dans l'Oklahoma. L'antithèse est frappante : la chauve-souris s'ennuie à mourir (« Elle vint chercher l'oubli // Au fond d'un vieux manoir // Où elle mourait d'ennui ») et le parapluie mène une vie de bâton de chaise (expression faisant référence au train d'enfer des chaises à porteurs munies de brancards et portées à bras d'hommes, jadis utilisées par les personnes de qualité). Histoire de rien, notre guilleret pépin accompagne les dames à la sortie des salons de coiffure, après une permanente sous casque chaud avec bigoudis (« Puis il se déplia // Sur une permanente // Puis il se déplia // Car il pleuvait sur Nantes »).
[phrase de transition vers la seconde sous-partie]
Thomas Fersen tire en plein dans le c½ur du lecteur. C'est une prouesse que de maintenir l'intérêt de l'auditeur, grâce à la force de son style, d'un récit pas piqué des hannetons. Où d'ailleurs rien ne se passe, ou si peu...
B Une comptine tragico-lyrique, un conte fantastique, ou une comédie dépressive ?
[phrase d'annonce de la deuxième sous-partie du premier volet]
Fersen jongle entre la fantaisie débridée, déjantée de la farce et la tragédie sombre...
Le procédé dominant est celui du comique de l'absurde : une chauve-souris complètement à côté de la plaque, qui passe son temps à se prendre des coups de parapluie. Bref, elle a la guigne ! Autrement dit et de façon plus prosaïque, elle va de pépins en pépins... Résumons : un parapluie à la ramasse, une chauve-souris avec une araignée au plafond, tout cela est source de drôlerie, forcément. La définition du comique tient, pour ce qui concerne cette chanson, dans la distance qui sépare un désir (le désir amoureux) et sa satisfaction, sa réalisation. La tonalité du texte est pathétique aussi, car le portrait de cette chauve-souris larmoyante est émouvant. Sa situation est poignante : en effet, rien ne semble arrêter cette passion sulfureuse pour ce diable de fend-le-vent ! L'histoire s'achève par une lamentable catastrophe : « Un jour de mauvais temps, // Un brusque coup de vent // lui mit les pieds devant »). Un vent à écorner les b½ufs vient à bout de l'ustensile, pardon, de l'élu de son c½ur ! Cette chanson d'amour prendrait l'allure, sur la fin, d'un requiem à la tonalité sombre. Mais que nenni ! C'est une fable où l'auteur trompe son monde : la chauve-souris se retrouve bras dessus bras dessous avec son parapluie adoré, sans doute froissé, la superbe un peu en berne, mais avec un reste de vie. Un tantinet sceptique, on se dit bêtement que le plafond de la mairie servira plus sûrement à égoutter le parapluie qu'à sécher les larmes de cette souris lilliputienne. Mariage de la carpe et du lapin oblige, nos deux colocataires s'achètent une vue imprenable sur les combles mansardées de l'hôtel de ville. Un petit coin de paradis, un gratte-ciel plutôt escarpé, faut quand même l'avouer, pour une parade nuptiale circassienne. Pour parler d'amour, autant prendre de l'altitude. L'humour décalé joue à plein. La comptine s'achève par ce spectacle aérien d'un parapluie désertant la tyrolienne de son compère « acrobate », pour finir, s'imagine-t-on, suspendu à une poutre par des pinces à linges... Beau paradoxe que ces deux tourtereaux funambules qui défient les lois de l'apesanteur sous l'appentis : un vrai conte de fées que cette belle vie de château ! Nos deux jeunes mariés élisent domicile parmi les charpentes de la mairie d'arrondissement, loin du bruit de la ville. De ce scénario à l'eau de rose suinte une ironie savoureuse : Fersen s'amuse à insister sur l'écart entre les rêves du chiroptère et la cruelle vérité des faits. Une ironie tragique, qu'on retrouve dans une tradition toute théâtrale, disons même moliéresque, affectionnant le retournement de situation, le rebondissement final. Une magie vient tout résoudre dans le dernier acte, la baguette de Merlin l'enchanteur en moins. Belle ironie du destin ! C'est quand leur vie n'est plus une vie que les deux protagonistes, nos deux équilibristes plutôt, tombent dans les bras l'un de l'autre pour « se dire oui ». Tout de suite nous vient à l'esprit les paroles d'une complainte de Georges Brassens*: « Je lui propose un peu d'abri // En séchant l'eau de sa frimousse // D'un air très doux, ell' m'a dit oui // Un p'tit coin d'parapluie // Contre un coin d'paradis // Elle avait quelque chose d'un ange... » (composition « Le parapluie », Brassens, 1953). Chez Fersen, deux êtres blessés par la vie, dont l'un crache ses boyaux, entrent en collision pour vivre une histoire d'amour improbable. Quoique...Ne dit-on pas : mariage pluvieux, mariage heureux ? Le comique parodique, autre facilité de scénario, domine dans cette ariette à roucoulades. Fersen, qui déclare un goût pour le rêve, pour le fantastique - mais aussi pour les accessoires - s'inspire des contes merveilleux. Dans « Le Petit Chaperon rouge » de Perrault, la « mère grand » - d'accord elle était « enrhumée » et « se trouvait un peu mal » -, ne fait pas la différence entre le grand méchant loup et sa petite fille lui apportant une galette et un pot de beurre. On ne peut davantage reprocher, quiproquo oblige, à cette chauve-souris qui perd le nord de ne pas faire la différence entre un parapluie et un congénère mâle. D'autre part, Fersen nous fait l'émouvant récit d'une réhabilitation, d'une métamorphose, comme dans les contes de la mère l'oie. Peut-être que, de la même manière que dans le récit des frères Grimm intitulé « Der Froschkönig », une méchante sorcière aurait jeté un sort à notre beau prince charmant ! L'influence d'une certaine littérature de l'enfance (fabliaux, récits, nouvelles fantastiques) se fait sentir. On retrouve dans la chanson de Fersen le thème de la quête impossible : thème récurrent dans les contes de Perrault [1628-1703], de la baronne d'Aulnoy [1651-1705] ou de Madame Leprince de Beaumont [1711- 1780], auteure de « La Belle et la Bête » (1751). A cette différence près que certains détails ici sont parfois scabreux : la chauve-souris se gausse de retrouver sa chère petite chose ressuscitée. L'occasion pour Fersen de nous réserver quelques métaphores croustillantes ou allusions coquines (« Je le croyais perdu // Le manche est revenu ». Bon, rien à voir avec la marche du concombre de Boris Vian, mais tout de même, on flirte avec le comique troupier (« Le grand parapluie noir // Sortait de son étui »). A moins de considérer que l'expression « Le manche est revenu » soit un emprunt, en guise de clin d'½il à la chanson de garnison ou de colonie de vacances. On se rappelle les paroles de la comptine adaptée par Henri Dès : « Buvons un coup ma serpette est perdue // Mais le manche, mais le manche // Buvons un coup ma serpette est perdue // Mais le manche est revenu ! », reprise en ch½ur, tout en levant le coude, dans le registre de la chanson à boire. Fruit d'un travail éblouissant sur les mots, l'écriture de Fersen se greffe sur une intrigue désinvolte, pleine de cocasserie. L'auteur aime planter ses caractères dans des animaux, et surtout, il sait capturer la poésie de la vie. Le fantastique se greffe sur un suspense teinté d'onirisme et d'étrangeté, comme dans les films de Henri-Georges Clouzot (« Un grand parapluie noir // Découpé dans la nuit »). Ou bien encore de Pedro Almodovar (mélodie mexicaine « Cucurucucu Paloma » chantée par le brésilien Caetano Veloso dans son film « Hable con ella » - 2002). Fersen ne sort pas toujours des sentiers battus, il n'évite pas la rime léonine, un peu facile, entre « chaise » et le cimetière du « Père-Lachaise ». Ni les formules faciles, qui bricolent avec la paronomase (« c'est la chance qui m'sourit »). Ni avec le truisme : la chauve-souris est un animal qui symbolise dans les mentalités ancestrales la chance, la réussite. Bref, il s'en donne à c½ur joie dans cette guirlande d'images qui se déploient sous nos yeux écarquillés. Le chanteur Thomas Fersen fait preuve d'une grande minutie dans le choix des mots qui composent son texte, dans ses phrases qui bousculent la syntaxe ordinaire, offrant à ceux qui l'écoutent ou qui se faufilent dans ses concerts, la possibilité de multiples interprétations. Avec un c½ur d'enfant, avec une gaieté scolaire doublée d'une mélancolie en clair-obscur, sa marche vers la littérature poétique emprunte des chemins buissonniers.
[phrase de transition vers la deuxième grande partie du commentaire]
Intéressons-nous à la marque de fabrique de cet auteur inclassable...
II. Un songe lyrique, un détour narratif en quête d'un sens de la vie
A. Le choix de l'aberration biologique : une parodie de la fable, du conte, le jeu avec les textes et les mots
La parole du conte ou des comptines pour enfants sait conserver tous ses atouts, surtout dans ses capacités subversives. Mais d'où vient le choix aberrant de la chauve-souris et du parapluie ?
Thomas Fersen répondait à cette question dans l'une de ses rares interviews : « J'étais au Sri Lanka dans un jardin botanique. Je regardais de grands arbres auxquels pendaient des milliers d'énormes fruits sombres qui étaient en fait des chauves-souris. L'analogie avec les parapluies m'est venue immédiatement, sans aucune réflexion ». Voilà une déclaration qui peut éclairer certains passages du texte : « Puis le grand accessoire // Se mit à voyager // Après les palabres... » (référence aux arbres à palabres d'Afrique ou aux arbres sacrés de Ceylan). A partir de là, tout s'enchaîne. L'imagination fait le reste, évidemment, pour aboutir à l'image idyllique du couple en lune de miel, qui ne pense qu'à s'envoyer en l'air dans le périmètre modeste d'une poutrelle fuligineuse. Drôle de garçonnière ! Mais quelle intrigue échevelée ! Un beau pied de nez parodique aux séries « soap » ! Une vamp sur pattes aux grandes oreilles, cherchant à trouver chaussure à son pied, « ça n'existe pas ! », dirait Desnos. Une chauve-souris folâtrant dans les charpentes poussiéreuses avec le squelette d'un parapluie, dont la survie tient du miracle (« On le laissa pour mort // Dans quelque caniveau // On le laissa pour mort // Avec le bec dans l'eau »), voilà de quoi nous mettre dans un état de sidération ! Ne cherchons pas une logique dans le propos, mais plutôt dans le jeu d'esprit. Un calembour en guise de divertissement poétique à propos du sémantisme de « bec » : avoir « le bec dans l'eau » signifie « être perdu». La plaisanterie s'appuie ici sur la double acception du mot « bec » qui s'applique aussi pour notre « grand accessoire » : le « bec de canard » d'un pépin, un parapluie « à bec de canne ». A moins qu'il ne s'agisse d'un jeu de mots, par analogie, peut-être, avec un type de robinet : le mitigeur évier « avec bec à parapluie ». Toujours est-il que notre pépin finit par se prendre au jeu avec cette escort-girl de haut vol, c'est le cas de le dire. Une belle tringle de penderie pour se retrouver bec à bec ou tête bêche ! « Et pourquoi pas ! », nous lancerait par défi le poète Robert Desnos... Après tout, comme son étymologie l'indique, l'ombrelle est destinée à faire de l'ombre, et la chauve souris ne rechignera pas à y trouver l'obscurité ténébreuse qu'elle apprécie tant... L'auditeur éberlué suit les pas perdus des personnages : une chauve-souris qui n'a rien de la blonde platine hypersexy et qui a tout d'une cinglée notoire, un parapluie qui joue les play boy, pas très gentlemen de la City. Ce dernier titube pour se trouver réduit en bouillie, il finit en capilotade dans un sordide « caniveau ». Des amours manquées, des amitiés boiteuses, tout cela forme un ensemble plutôt dissonant, à l'image du bestiaire de ce quatrième album de Fersen où défilent bourdons et cafards, morpions ou fourmis et même des sangsues ! De quoi brouiller les ondes et surtout nos repères. Naturellement, force est d'observer que l'arborescence de la narration s'organise ici selon les images associées à des mots. Dans cette amusette à l'écriture tendue, l'effeuillage de mots n'est pas exempt de pathétique et de lyrisme. Les émotions filent avec des battements d'ailes, parfois dramatisées, dans cette mélodie d'où finit par sourdre la jubilation féroce du compositeur. Somme toute, notre héroïne tombe amoureuse d'un accessoire, parachuté, on ne sait trop comment, dans sa vie. Relation peu flatteuse ou peu enviable, s'il en fut... Tout cela peut rappeler le féérique déchirant de « L'Ecume des jours » de Boris Vian. A moins que la chauve-souris de Fersen ne soit pas une chauve-souris ... Après tout, le philosophe Jean-Paul Sartre avait bien son « castor » (surnom hypocoristique donné par ce dernier à sa compagne Simone de Beauvoir). L'univers de Thomas Fersen est renversant ! Comme ces chauves-souris qui dorment à la renverse, c'est-à-dire tête en bas ! Il y a de quoi nous retourner. Ou tomber de son arbre, pour boucler la boucle. La parodie affleure, partout et obstinément. Celle des contes pour enfants, nous l'avons dit. Mais aussi celle des légendes mythologiques. Cette comptine, c'est le retournement, version post-punk, du mythe d'Orphée et Eurydice ! Et puis, il y a les mots. Sans cesse, notre chansonnier s'amuse avec les mots, on sent qu'il a un rapport musical et surtout très plastique avec la langue. Notamment quand il évoque les contorsions burlesques et autres prouesses absurdes - puisqu'elles n'en sont pas !- de ce pébroque. L'expression « avoir le pépin pour quelqu'un » signifie avoir le béguin, vivre une amourette de garnison... Fersen joue également avec les bouts-rimés. La recherche de la rime doit beaucoup au vocabulaire des enfants. Il en va ainsi pour le mot-rime « détritus », auquel succède un substantif flanqué d'un adjectif assez puéril ou primesautier (« denrées foutues »). Mais c'est tellement poétique et si peu académique ! L'art d'écrire ne s'appuie pas systématiquement chez Fersen sur le décalage (« riant comme une baleine // Pleurant comme une madeleine »). En témoignent les fréquentes co-occurrences dans les phrases (redoublement des termes « un parapluie », « un grand parapluie noir», « le grand parapluie noir »), l'épanalepse (« Dans son habit noir, // Son habit noir de jais »), les reprises synonymiques (« détritus », « denrées »). Dans la lignée d'un Robert Desnos*, d'un Jacques Prévert, d'un Charles Trenet, d'un Gainsbourg, ou d'un Higelin, Thomas Fersen fuit la langue intellectuelle. A coups de clins d'½il, peut-être autobiographiques : « Puis il se déplia // Car il pleuvait sur Nantes ». Ou bien clins d'½il volontaires à la poésie prévertienne : «Rappelle-toi Barbara // Il pleuvait sans cesse sur Brest ce jour-là // Et tu marchais souriante » (poème « Barbara », Jacques Prévert, 1946). On rétorquera : « Brest », ce n'est pas « Nantes ». Là, il faut chercher dans les romances d'une autre chanteuse du côté de « la Grange-au-loup » (« Nantes » - Barbara - 1963). Mais revenons au texte de Fersen et à son dénouement. Le suspense crée un sentiment d'attente chez l'auditeur, d'un bout à l'autre de ce vaudeville chanté. Il faut produire encore et toujours un effet de surprise pour assurer le spectacle... C'est à croire que notre parapluie a vécu dix vies en une seule ! Notre petite chauve-souris, la tête sens dessus dessous, parviendra-t-elle à se sortir du piège dans lequel elle s'est enfermée elle-même ? A force de bagoter dans l'interprétation du texte, on finit par se demander : mais à qui cette tendre chansonnette s'adresse ? A quelque midinette ou autre soubrette un peu attardée ? Que veut dire ce texte à la fantaisie noire ? Pour vivre heureux, vivons cachés ? Soit, mais peut-on nous satisfaire de cette morale trop simpliste ?
[phrase de liaison vers la dernière sous-partie du commentaire]
Comment définir ce genre de chanson ? Un thriller métaphysique ? Un récit d'apprentissage, d'initiation érotique, féérique? Nul ne saurait l'affirmer, puisque le loufoque et l'incongru l'emportent sur la poésie romantique des mots. En revanche, il ne faudrait pas se contenter de dire que l'important, c'est ce qui se passe entre les mots...C'est ce qu'il convient d'examiner dès à présent.
B. Une imprévisible leçon morale. L'éloge de l'inadaptation ?
La chanson apporte son lot d'étonnement, nous l'avons dit, d'amusement, mais aussi de questionnement. Néanmoins, il convient de dépasser la sensation d'une jubilation rafraîchissante et l'impression d'une hilarité contagieuse.
Le chanteur-compositeur opte pour un registre grinçant, pour ne pas dire assez dérangeant, en multipliant les invraisemblances. Le conte, la comptine, ont une vocation éducative : l'issue du récit est ouverte, pour ne pas dire penchée sur le vide. Le dénouement dans cette « love song » est lourd de sous-entendus. Tout l'art de Fersen, si difficile à cataloguer, consiste à parler de l'absurdité de la condition humaine, sans avoir l'air d'en parler...Nous viennent à l'esprit les thèmes prévisibles du fantasme de l'amour, de l'altérité, du double, de la peur de vivre. Que faut-il deviner ? A part cette envie de raconter des histoires sans queue ni tête, de débiter des blagues rigolardes entre rêve et cauchemar ? Il y a de quoi prendre le contre-pied de la morale philosophique d'un Descartes : « la chose du monde la mieux partagée », n'est pas le bon sens, ni même la logique, mais plutôt le non-sens...Le style provocateur de Fersen doit beaucoup à sa recherche de « déstabilisation », à sa tendance compulsive à la désobéissance... De quoi nourrir l'imagination d'un jeune public toujours friand des cadavres-exquis surréalistes ! Ici, cela déconcerte nos catégories mentales. Cette histoire assez folle contient peut-être le sens d'un destin ? Evitons l'interprétation un peu trop étroite des amours non conformes. Même si cette belle chanson nous fait penser, par bien des aspects, au film « Harold and Maude » (film de Hal Ashby, 1971). Evitons aussi les plaisanteries de mauvais goût ou autres turlupinades (« Je le croyais perdu, // Le manche est revenu »), au sujet du format rétractable de cet objet télescopique, lui permettant de s'allonger ou bien de se raccourcir. Même si, n'étant pas tombés de la dernière pluie, nous nous disons que l'amour n'est pas que dans la tête ! Le « phallogocentrisme » écarté avec prudence, on pourrait se rafistoler à l'occasion une morale toute pragmatique : « mit Speck fängt man Maüse », dit-on outre-Rhin. Encore une histoire de souris, décidément ! Autrement formulé, on n'attrape pas des mouches avec du vinaigre (« Time and tide wait for no woman », côté britannique). Sans doute... Au fil du texte, d'une écriture impossible à dater ou à rapprocher d'un mouvement littéraire, Fersen nous désarçonne. Il nous embarque dans une embardée, celle des caleçonnades du flirt amoureux... On n'est pas en reste d'aphorismes, cela va de soi. On pense bien sûr à la recommandation de Beaumarchais : en toutes choses, il faut se presser de rire de tout avant d'être obligé d'en pleurer (« Le Barbier de Séville ou la Précaution inutile » - 1775). Difficile d'imaginer ici une morale tangible qui ouvre les yeux sur notre vie. Il faut formuler des hypothèses. Et pourquoi pas celle-là : on passe toute sa vie à chercher quelqu'un à aimer. Et par qui on serait aimé, cela va de soi. On a le droit de rêver ! Le rêve, qui peut être un délire, serait pour nous tous une raison de continuer à vivre : quand on n'a personne à aimer, on aime ce que l'on a. Ce qui vaut pour les carcasses de parapluie. Philosophie peu flatteuse, il faut en convenir tout de même. Plus déprimant encore : aimer, c'est vouloir donner ce qu'on n'a pas à quelqu'un qui n'en veut pas...Des psychanalystes savants diraient que le désir ne vaut que par le manque. Petite phrase qu'on n'espère pas définitive... Car après tout, la voie reste ouverte à ceux qui croient au grand amour. L'auditeur est somme toute appelé à deviner ce que le compositeur lui suggère, puisque rien dans le texte ne dévoile explicitement une vérité philosophique ou morale... Une autre piste pour nos tâtonnements : tout laisse entendre que rien n'est jamais écrit dans notre vie. Nous sommes un hasard qui aurait pu ne pas se produire, ni avoir lieu. Nos amours ne sont que rencontres de hasard. Avec un possible alter ego. Ou sans. Et puis, comme l'affirme avec une grande rigueur logique le pédopsychiatre Cyrulnik, « pour se rencontrer, il faut avoir été séparés » (« Les Nourritures affectives » - Boris Cyrulnik - 1993). « La chauve-souris » est une histoire non pas lumineuse, mais lunaire : elle invite le spectateur ou l'auditeur à disséquer ses propres rêves pour mieux éradiquer ceux qui sont impossibles à réaliser. Laissons de côté l'idée, un peu intrusive, que Thomas Fersen aurait besoin d'exprimer, par ses compositions musicales, son obsession du fantasme féminin. D'autres esprits vagabonds nous feraient observer que certaines chauves-souris sont hématophages. Il y a de quoi mettre en branle les délires draculéens ou lycanthropiques, de certains ! Plus sérieusement, revenons à la structure narrative, très marquée par un passage des ténèbres à la lumière. La chauve-souris de notre chanson est amoureuse d'un drôle de coco. De déveine en déveine ; le destin semble l'avoir oubliée. Elle incarne la malchance, la série noire, la scoumoune, aujourd'hui, on dirait la poisse, mieux, la loose. Animée d'une soif d'absolu, son désir la porte à produire de la lumière, même dans la profondeur des ténèbres. Mais sans parler des grenouillages sexuels, les sentiments sont-ils vrais ? Ou bien ne seraient-ils que jeux d'ombres, effets de surface, simulacres ? Mais le dénouement est quand même un fabuleux pied de nez au destin du sort ! L'amour serait-il « un briseur de soucis », pour reprendre cette expression à Goethe ? Quoi qu'il en soit, il n'y a pas à tortiller : comme le pensait Tchekhov, la condition naturelle de l'homme est d'être ridicule.... Plus certainement, on peut penser que Fersen est un optimiste. Car s'adressant aux enfants ou aux jeunes adolescents, il entend leur rendre un peu d'espérance. Jusqu'où puis-je aller par amour ? Que sommes-nous capables de faire par amour ? Autre problématique, celle de la beauté et de la laideur... De quoi avons-nous besoin pour nous convaincre d'aimer ? Faut-il aimer son semblable ? Cette dernière question portant sur nos préférences sexuelles. On peut admettre une philosophie plus positive avec pour slogan « yes we can ! » : tout individu doit trouver en lui-même les ressources nécessaires, l'énergie pour accomplir l'impossible. On doit mettre un point d'honneur à refuser le malheur, à moins de sombrer dans l'acceptation incrédule de la fatalité de la vie. Les rêves insensés font naître l'espoir. Le conte est un langage universel : celui de nos rêves, de nos hantises aussi. Dans le langage des rêves, le parapluie symbolise le besoin de se protéger, de trouver un refuge. Mais il est aussi, comme la canne, un symbole archétype du sexe masculin. La chauve-souris peut signifier la renaissance, un renversement total de la situation présente. Quoi qu'il en soit, Thomas Fersen est un prodigieux conteur qui emmène les enfants, la jeunesse et les plus grands, dans des contrées oniriques pour mieux s'élever au-dessus du malheur. A moins de penser qu'il nous livre un récit sur rien...Pour mieux dire que la vie nous repasse toujours les mêmes plats ! Tout le monde aura compris qu'après tout, pour vivre, les gens ont besoin de croire en quelque chose...
Conclusion
[synthèse de récapitulation, de rappel des grandes lignes de son commentaire]
Dans tout drame loufoque, perclus d'invraisemblances, et insolemment iconoclaste, il faut se laisser aller à la rêverie, à la jubilation, à la magie. Savourer le quiproquo. Avec une histoire comme celle-ci, on ne tombe jamais dans l'ennui, à cause justement de l'ambiguïté. Difficile de rester insensible à ces images enfantines qui ont l'air de descendre de la lune, et qui traversent l'imagination de Fersen comme des météorites. Il nous reste une dernière chose à observer, qui vaut pour cette gentille historiette : la grandeur, la beauté d'une âme naît souvent de l'injustice...
[ouverture, élargissement du point de vue]
« Gavroche lunaire », pour reprendre l'expression de Patrice Delbourg*, le chanteur Thomas Fersen reste une figure inclassable, mais surtout incontournable de la poésie et de la chanson française...
Notes
*« Les Funambules de la ritournelle. Cent fous chantants sur le fil », de Patrice Delbourg - Editions « Ecriture » - Paris - 2013
*Dans l'émission télévisée « Thé ou Café » du 6 octobre 2013, la journaliste Catherine Ceylac a demandé à son invité Thomas Fersen, s'il aimerait que ses textes soient étudiés à l'école. Le chanteur-compositeur, apôtre de l'école buissonnière, a dû s'imaginer un professeur en pleine action : « Prenez votre manuel à la page 19, chapitre Poésie, Thomas Fersen ou le miroir de l'humanité ». Sans attendre une seconde de plus, ce dernier a répondu à Catherine Ceylac: « certainement pas ! ». Bon, c'est trop tard pour nous, on avait déjà donné le devoir. Bien avant l'émission... alors, tant pis !
Travail personnel du professeur, Bernard Mirgain Toute reproduction interdite.*La chauve souris de Thomas Fersen, en streaming sur You Tube :
*Interview de Thomas Fersen par Catherine Ceylac sur France 2 - Emission "Thé ou café ?" - Dimanche 6 octobre 2013.
*Outil principal de travail :
Robinet mitigeur avec bec en parapluie
DOCUMENTS COMPLEMENTAIRES
DOCUMENT 1
La Chauve-souris et les deux Belettes
Jean de La Fontaine
Livre II, Fable 5
Une chauve-souris donna tête baissée a
Dans un nid de belettes ; et sitôt qu'elle y fut,
L'autre, envers les souris de longtemps courroucée,
Pour la dévorer accourut.
«Quoi ! vous osez, dit-elle, à mes yeux vous produire,
Après que votre race a tâché de me nuire!
N'êtes-vous pas souris ? Parlez sans fiction.
Oui, vous l'êtes, ou bien je ne suis pas belette.
- Pardonnez-moi, dit la pauvrette,
Ce n'est pas ma profession.
Moi souris ! Des méchants vous ont dit ces nouvelles.
Grâce à l'auteur de l'univers,
Je suis oiseau : voyez mes ailes.
Vive la gent qui fend les airs ! »
Sa raison plut, et sembla bonne.
Elle fait si bien qu'on lui donne
Liberté de se retirer.
Deux jours après, notre étourdie
Aveuglément se va fourrer
Chez une autre belette, aux oiseaux ennemie.
La voilà derechef en danger de sa vie.
La dame du logis, avec son long museau
S'en allait la croquer en qualité d'oiseau,
Quand elle protesta qu'on lui faisait outrage :
« Moi, pour telle passer ! Vous n'y regardez pas.
Qui fait l'oiseau ? C'est le plumage.
Je suis souris : vivent les rats !
Jupiter confonde les chats !
Par cette adroite repartie
Elle sauva deux fois sa vie.
Plusieurs se sont trouvés qui, d'écharpe changeants,
Aux dangers, ainsi qu'elle, ont souvent fait la figue.
Le sage dit, selon les gens,
«Vive le Roi ! vive la Ligue ! »
Jean de La Fontaine.
DOCUMENT 2.
Paroles et traduction de la mélodie mexicaine « Cucurucucu Paloma »
chantée par le chanteur brésilien Caetano Veloso (film d'Almodovar « Parle avec elle »).
Dicen que por las noches
Ils disent qu'il passait
No màs se le iba en puro llorar,
Ses nuits à pleurer
Dicen que no comia,
Ils disent qu'il ne mangeait pas
Nomas se le iba en puro tomar,
Il ne faisait que boire
Juran que el mismo cielo
Ils jurent que le ciel lui-même
Se estremecia al oir su llanto ;
Frémissait en écoutant ses pleurs
Como sufrio por ella,
Comme il a souffert pour elle
Que hasta en su muerte la fue llamando
Même dans sa mort il l'appelait
Ay, ay, ay, ay, ay, ... cantaba,
Ay, ay, ay, ay. , ay.... il chantait
Ay, ay, ay, ay, ay, ... gemia,
Ay, ay, ay, ay, ay...il gémissait
Ay, ay, ay, ay, ay, ... cantaba,
Ay, ay, ay, ay, ay.... il chantait
De pasión mortal... moria
De passion mortelle...il mourait
Que una paloma triste
Qu'une colombe triste
Muy de manana le va a cantar,
Va lui chanter tôt le matin
A la casita sola,
Seule dans la petite maison
Con sus puertitas de par en par,
Avec ses petites portes grandes ouvertes
Juran que esa paloma
Ils jurent que cette colombe
No es otra cosa mas que su alma,
N'est rien d'autre que son âme
Que todavia la espera
Qui attend toujours
A que regrese la desdichada
Le retour de la malheureuse
Cucurrucucu... paloma,
Cucurrucucu.... colombe
Cucurrucucu... no llores,
Cucurrucucu...ne pleure pas...
Las piedras jamas, paloma
Jamais les pierres, colombe
Que van a saber de amores !
Que savent-elles d'amour !
Cucurrucucu... paloma, ya no llores
Cucurrucucu...colombe, ne pleure plus
A écouter sur : http://www.lacoccinelle.net/262063.html
DOCUMENT 3.
La Chauve-souris.
A mi-carême, en carnaval,
On met un masque de velours.
Où va le masque après le bal ?
Il vole à la tombée du jour.
Oiseau de poils, oiseau sans plumes,
Il sort, quand l'étoile s'allume,
De son repaire de décombres.
Chauve-souris, masque de l'ombre.
Robert Desnos
DOCUMENT 4.
Les chauves-souris , de Maurice Rollinat.
« Mais pourquoi voler avec tant de mystère
« Et si longuement dans ces grands corridors ?
« Vous seriez si bien à votre aise dehors,
« Dans le brouillard frais qui tombe sur la terre.
« Vous avez sans doute un vol involontaire,
« O chauves-souris noires comme un remords !
« Mais pourquoi voler avec tant de mystère
« Et si longuement dans ces grands corridors ?
« Pour ainsi hanter ce château solitaire,
« Vous n'êtes pas des âmes de mauvais morts ?
« Enfin, pour ce soir, vivent les esprits forts !
« Je reste là, sans que la frayeur m'atterre.
« Mais pourquoi voler avec tant de mystère ?
DOCUMENT 5
Une fourmi de dix-huit mètres, de Robert Desnos
Une fourmi de dix-huit mètres
avec un chapeau sur la tête
ça n'existe pas, ça n'existe pas
Une fourmi traînant un char
plein de pingouins et de canards
ça n'existe pas, ça n'existe pas
Une fourmi parlant français
parlant latin et javanais
ça n'existe pas, ça n'existe pas
eh ! et pourquoi pas !
Robert Desnos
DOCUMENT 6
Barbara
Rappelle-toi Barbara
Il pleuvait sans cesse sur Brest ce jour-là
Et tu marchais souriante
É panouie ravie ruisselante
Sous la pluie
Rappelle-toi Barbara
Il pleuvait sans cesse sur Brest
Et je t'ai croisée rue de Siam
Tu souriais
Et moi je souriais de même
Rappelle-toi Barbara
Toi que je ne connaissais pas
Toi qui ne me connaissais pas
Rappelle-toi
Rappelle-toi quand même ce jour-là
N'oublie pas
Un homme sous un porche s'abritait
Et il a crié ton nom
Barbara
Et tu as couru vers lui sous la pluie
Ruisselante ravie épanouie
Et tu t'es jetée dans ses bras
Rappelle-toi cela Barbara
Et ne m'en veux pas si je te tutoie
Je dis tu à tous ceux que j'aime
Même si je ne les ai vus qu'une seule fois
Je dis tu à tous ceux qui s'aiment
Même si je ne les connais pas
Rappelle-toi Barbara
N'oublie pas
Cette pluie sage et heureuse
Sur ton visage heureux
Sur cette ville heureuse
Cette pluie sur la mer
Sur l'arsenal
Sur le bateau d'Ouessant
Oh Barbara
Quelle connerie la guerre
Qu'es-tu devenue maintenant
Sous cette pluie de fer
De feu d'acier de sang
Et celui qui te serrait dans ses bras
Amoureusement
Est-il mort disparu ou bien encore vivant
Oh Barbara
Il pleut sans cesse sur Brest
Comme il pleuvait avant
Mais ce n'est plus pareil et tout est abimé
C'est une pluie de deuil terrible et désolée
Ce n'est même plus l'orage
De fer d'acier de sang
Tout simplement des nuages
Qui crèvent comme des chiens
Des chiens qui disparaissent
Au fil de l'eau sur Brest
Et vont pourrir au loin
Au loin très loin de Brest
Dont il ne reste rien.
Jacques Prévert, Paroles
DOCUMENT 7
Le parapluie, de Georges Brassens (1952)
Il pleuvait fort sur la grand-route
Ell' cheminait sans parapluie
J'en avais un, volé, sans doute
Le matin même à un ami
Courant alors à sa rescousse
Je lui propose un peu d'abri
En séchant l'eau de sa frimousse
D'un air très doux, ell' m'a dit " oui "
Un p'tit coin d'parapluie
Contre un coin d'paradis
Elle avait quelque chos' d'un ange
Un p'tit coin d'paradis
Contre un coin d'parapluie
Je n'perdais pas au chang', pardi
Chemin faisant, que ce fut tendre
D'ouïr à deux le chant joli
Que l'eau du ciel faisait entendre
Sur le toit de mon parapluie
J'aurais voulu, comme au déluge
Voir sans arrêt tomber la pluie
Pour la garder, sous mon refuge
Quarante jours, quarante nuits
Un p'tit coin d'parapluie
Contre un coin d'paradis
Elle avait quelque chos' d'un ange
Un p'tit coin d'paradis
Contre un coin d'parapluie
Je n'perdais pas au chang', pardi
Mais bêtement, même en orage
Les routes vont vers des pays
Bientôt le sien fit un barrage
A l'horizon de ma folie
Il a fallu qu'elle me quitte
Après m'avoir dit grand merci
Et je l'ai vue toute petite
Partir gaiement vers mon oubli
Un p'tit coin d'parapluie
Contre un coin d'paradis
Elle avait quelque chos' d'un ange
Un p'tit coin d'paradis
Contre un coin d'parapluie
Je n'perdais pas au chang', pardi
DOCUMENT 1
La Chauve-souris et les deux Belettes
Jean de La Fontaine
Livre II, Fable 5
Une chauve-souris donna tête baissée a
Dans un nid de belettes ; et sitôt qu'elle y fut,
L'autre, envers les souris de longtemps courroucée,
Pour la dévorer accourut.
«Quoi ! vous osez, dit-elle, à mes yeux vous produire,
Après que votre race a tâché de me nuire!
N'êtes-vous pas souris ? Parlez sans fiction.
Oui, vous l'êtes, ou bien je ne suis pas belette.
- Pardonnez-moi, dit la pauvrette,
Ce n'est pas ma profession.
Moi souris ! Des méchants vous ont dit ces nouvelles.
Grâce à l'auteur de l'univers,
Je suis oiseau : voyez mes ailes.
Vive la gent qui fend les airs ! »
Sa raison plut, et sembla bonne.
Elle fait si bien qu'on lui donne
Liberté de se retirer.
Deux jours après, notre étourdie
Aveuglément se va fourrer
Chez une autre belette, aux oiseaux ennemie.
La voilà derechef en danger de sa vie.
La dame du logis, avec son long museau
S'en allait la croquer en qualité d'oiseau,
Quand elle protesta qu'on lui faisait outrage :
« Moi, pour telle passer ! Vous n'y regardez pas.
Qui fait l'oiseau ? C'est le plumage.
Je suis souris : vivent les rats !
Jupiter confonde les chats !
Par cette adroite repartie
Elle sauva deux fois sa vie.
Plusieurs se sont trouvés qui, d'écharpe changeants,
Aux dangers, ainsi qu'elle, ont souvent fait la figue.
Le sage dit, selon les gens,
«Vive le Roi ! vive la Ligue ! »
Jean de La Fontaine.
DOCUMENT 2.
Paroles et traduction de la mélodie mexicaine « Cucurucucu Paloma »
chantée par le chanteur brésilien Caetano Veloso (film d'Almodovar « Parle avec elle »).
Dicen que por las noches
Ils disent qu'il passait
No màs se le iba en puro llorar,
Ses nuits à pleurer
Dicen que no comia,
Ils disent qu'il ne mangeait pas
Nomas se le iba en puro tomar,
Il ne faisait que boire
Juran que el mismo cielo
Ils jurent que le ciel lui-même
Se estremecia al oir su llanto ;
Frémissait en écoutant ses pleurs
Como sufrio por ella,
Comme il a souffert pour elle
Que hasta en su muerte la fue llamando
Même dans sa mort il l'appelait
Ay, ay, ay, ay, ay, ... cantaba,
Ay, ay, ay, ay. , ay.... il chantait
Ay, ay, ay, ay, ay, ... gemia,
Ay, ay, ay, ay, ay...il gémissait
Ay, ay, ay, ay, ay, ... cantaba,
Ay, ay, ay, ay, ay.... il chantait
De pasión mortal... moria
De passion mortelle...il mourait
Que una paloma triste
Qu'une colombe triste
Muy de manana le va a cantar,
Va lui chanter tôt le matin
A la casita sola,
Seule dans la petite maison
Con sus puertitas de par en par,
Avec ses petites portes grandes ouvertes
Juran que esa paloma
Ils jurent que cette colombe
No es otra cosa mas que su alma,
N'est rien d'autre que son âme
Que todavia la espera
Qui attend toujours
A que regrese la desdichada
Le retour de la malheureuse
Cucurrucucu... paloma,
Cucurrucucu.... colombe
Cucurrucucu... no llores,
Cucurrucucu...ne pleure pas...
Las piedras jamas, paloma
Jamais les pierres, colombe
Que van a saber de amores !
Que savent-elles d'amour !
Cucurrucucu... paloma, ya no llores
Cucurrucucu...colombe, ne pleure plus
A écouter sur : http://www.lacoccinelle.net/262063.html
DOCUMENT 3.
La Chauve-souris.
A mi-carême, en carnaval,
On met un masque de velours.
Où va le masque après le bal ?
Il vole à la tombée du jour.
Oiseau de poils, oiseau sans plumes,
Il sort, quand l'étoile s'allume,
De son repaire de décombres.
Chauve-souris, masque de l'ombre.
Robert Desnos
DOCUMENT 4.
Les chauves-souris , de Maurice Rollinat.
« Mais pourquoi voler avec tant de mystère
« Et si longuement dans ces grands corridors ?
« Vous seriez si bien à votre aise dehors,
« Dans le brouillard frais qui tombe sur la terre.
« Vous avez sans doute un vol involontaire,
« O chauves-souris noires comme un remords !
« Mais pourquoi voler avec tant de mystère
« Et si longuement dans ces grands corridors ?
« Pour ainsi hanter ce château solitaire,
« Vous n'êtes pas des âmes de mauvais morts ?
« Enfin, pour ce soir, vivent les esprits forts !
« Je reste là, sans que la frayeur m'atterre.
« Mais pourquoi voler avec tant de mystère ?
DOCUMENT 5
Une fourmi de dix-huit mètres, de Robert Desnos
Une fourmi de dix-huit mètres
avec un chapeau sur la tête
ça n'existe pas, ça n'existe pas
Une fourmi traînant un char
plein de pingouins et de canards
ça n'existe pas, ça n'existe pas
Une fourmi parlant français
parlant latin et javanais
ça n'existe pas, ça n'existe pas
eh ! et pourquoi pas !
Robert Desnos
DOCUMENT 6
Barbara
Rappelle-toi Barbara
Il pleuvait sans cesse sur Brest ce jour-là
Et tu marchais souriante
É panouie ravie ruisselante
Sous la pluie
Rappelle-toi Barbara
Il pleuvait sans cesse sur Brest
Et je t'ai croisée rue de Siam
Tu souriais
Et moi je souriais de même
Rappelle-toi Barbara
Toi que je ne connaissais pas
Toi qui ne me connaissais pas
Rappelle-toi
Rappelle-toi quand même ce jour-là
N'oublie pas
Un homme sous un porche s'abritait
Et il a crié ton nom
Barbara
Et tu as couru vers lui sous la pluie
Ruisselante ravie épanouie
Et tu t'es jetée dans ses bras
Rappelle-toi cela Barbara
Et ne m'en veux pas si je te tutoie
Je dis tu à tous ceux que j'aime
Même si je ne les ai vus qu'une seule fois
Je dis tu à tous ceux qui s'aiment
Même si je ne les connais pas
Rappelle-toi Barbara
N'oublie pas
Cette pluie sage et heureuse
Sur ton visage heureux
Sur cette ville heureuse
Cette pluie sur la mer
Sur l'arsenal
Sur le bateau d'Ouessant
Oh Barbara
Quelle connerie la guerre
Qu'es-tu devenue maintenant
Sous cette pluie de fer
De feu d'acier de sang
Et celui qui te serrait dans ses bras
Amoureusement
Est-il mort disparu ou bien encore vivant
Oh Barbara
Il pleut sans cesse sur Brest
Comme il pleuvait avant
Mais ce n'est plus pareil et tout est abimé
C'est une pluie de deuil terrible et désolée
Ce n'est même plus l'orage
De fer d'acier de sang
Tout simplement des nuages
Qui crèvent comme des chiens
Des chiens qui disparaissent
Au fil de l'eau sur Brest
Et vont pourrir au loin
Au loin très loin de Brest
Dont il ne reste rien.
Jacques Prévert, Paroles
DOCUMENT 7
Le parapluie, de Georges Brassens (1952)
Il pleuvait fort sur la grand-route
Ell' cheminait sans parapluie
J'en avais un, volé, sans doute
Le matin même à un ami
Courant alors à sa rescousse
Je lui propose un peu d'abri
En séchant l'eau de sa frimousse
D'un air très doux, ell' m'a dit " oui "
Un p'tit coin d'parapluie
Contre un coin d'paradis
Elle avait quelque chos' d'un ange
Un p'tit coin d'paradis
Contre un coin d'parapluie
Je n'perdais pas au chang', pardi
Chemin faisant, que ce fut tendre
D'ouïr à deux le chant joli
Que l'eau du ciel faisait entendre
Sur le toit de mon parapluie
J'aurais voulu, comme au déluge
Voir sans arrêt tomber la pluie
Pour la garder, sous mon refuge
Quarante jours, quarante nuits
Un p'tit coin d'parapluie
Contre un coin d'paradis
Elle avait quelque chos' d'un ange
Un p'tit coin d'paradis
Contre un coin d'parapluie
Je n'perdais pas au chang', pardi
Mais bêtement, même en orage
Les routes vont vers des pays
Bientôt le sien fit un barrage
A l'horizon de ma folie
Il a fallu qu'elle me quitte
Après m'avoir dit grand merci
Et je l'ai vue toute petite
Partir gaiement vers mon oubli
Un p'tit coin d'parapluie
Contre un coin d'paradis
Elle avait quelque chos' d'un ange
Un p'tit coin d'paradis
Contre un coin d'parapluie
Je n'perdais pas au chang', pardi
Buvons un coup ma serpette est perdue
Chanson de colonie de vacances & chanson à boire
Buvons un coup ma serpette est perdue
Mais le manche, mais le manche
Buvons un coup ma serpette est perdue
Mais le manche est revenu !
Buvons deux coups ma fourchette est tordue
Mais le manche, mais le manche
Buvons deux coups ma fourchette est tordue
Mais le manch' n'est pas perdu !
Buvons trois coups ma lorgnette est fourchue
Mais la tige, mais la tige
Buvons trois coups ma lorgnette est fourchue
Mais la tige est bien dessus !
Buvons quatre coups ma hachette est fendue
Mais le manche, mais le manche
Buvons quatre coups ma hachette est fendue
Mais le manche est bien dessus !
Buvons cinq coups ma trompette est tordue
Mais la note, mais la note,
Buvons cinq coups ma trompette est tordue
Mais la note est revenue !
Buvons six coups ma raquette est rompue
Mais le manche, mais le manche
Buvons six coups ma raquette est rompue
Mais le manche est bien dessus !
Buvons sept coups ma chaussette est fourbue
Mais la jambe, mais la jambe
Buvons sept coups ma chaussette est fourbue
Mais la jambe est bien dessus !
Buvons huit coups ma pincette est fondue
Mais le manche, mais le manche
Buvons huit coups ma pincette est fondue
Mais le manche est revenu !
La serpette
Chanson enfantine traditionnelle - Adaptation Henri Dès
Buvons un coup ma serpette est perdue
Mais le manche, mais le manche
Buvons un coup ma serpette est perdue
Mais le manche est revenu
Bavas a cap ma sarpatta a parda
Ma la mache, ma la mache
Bavas a cap ma sarpatta a parda
Ma la macha a ravana
Bivis i cip moi sirpoitte i pirdi
Mis li moichi, mi li moichi
Mi li michi i rivini
Bovos...
Buvus...
http://www.youtube.com/watch?v=kITs6FOoxwk
Chanson de colonie de vacances & chanson à boire
Buvons un coup ma serpette est perdue
Mais le manche, mais le manche
Buvons un coup ma serpette est perdue
Mais le manche est revenu !
Buvons deux coups ma fourchette est tordue
Mais le manche, mais le manche
Buvons deux coups ma fourchette est tordue
Mais le manch' n'est pas perdu !
Buvons trois coups ma lorgnette est fourchue
Mais la tige, mais la tige
Buvons trois coups ma lorgnette est fourchue
Mais la tige est bien dessus !
Buvons quatre coups ma hachette est fendue
Mais le manche, mais le manche
Buvons quatre coups ma hachette est fendue
Mais le manche est bien dessus !
Buvons cinq coups ma trompette est tordue
Mais la note, mais la note,
Buvons cinq coups ma trompette est tordue
Mais la note est revenue !
Buvons six coups ma raquette est rompue
Mais le manche, mais le manche
Buvons six coups ma raquette est rompue
Mais le manche est bien dessus !
Buvons sept coups ma chaussette est fourbue
Mais la jambe, mais la jambe
Buvons sept coups ma chaussette est fourbue
Mais la jambe est bien dessus !
Buvons huit coups ma pincette est fondue
Mais le manche, mais le manche
Buvons huit coups ma pincette est fondue
Mais le manche est revenu !
La serpette
Chanson enfantine traditionnelle - Adaptation Henri Dès
Buvons un coup ma serpette est perdue
Mais le manche, mais le manche
Buvons un coup ma serpette est perdue
Mais le manche est revenu
Bavas a cap ma sarpatta a parda
Ma la mache, ma la mache
Bavas a cap ma sarpatta a parda
Ma la macha a ravana
Bivis i cip moi sirpoitte i pirdi
Mis li moichi, mi li moichi
Mi li michi i rivini
Bovos...
Buvus...
http://www.youtube.com/watch?v=kITs6FOoxwk

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